Cas d'étude
17/05/2023

L’importance de la loyauté dans l’obtention d’une autorisation de saisie-contrefaçon de brevet

Brève d'actualité sur le secteur de l'énergie

En quelques mots :

Nos avocats accompagnent une société distributrice de panneaux photovoltaïques dans un litige en contrefaçon de brevet. Ils ont obtenu que des saisies-contrefaçon pratiquées dans ses locaux ne puissent plus produire d’effet. 

Contexte :

Notre client importe et distribue des panneaux photovoltaïques. La partie adverse est un fabricant de panneaux solaires, qui mettent en œuvre une technologie qu’elle a brevetée. Elle est titulaire à ce titre d’un brevet européen désignant la France. Une procédure d’opposition à l’encontre de ce brevet est en cours devant l’Office européen des brevets (OEB).

Alors que ces oppositions étaient toujours en cours, la société adverse a obtenu du Tribunal judiciaire de Paris l’autorisation de faire pratiquer des saisies contrefaçon dans les locaux de notre cliente par deux ordonnances de février 2021. Après réalisation de ces saisies-contrefaçon, elle a assigné notre client, importateur et distributeur, aux côtés de son fournisseur, fabricant des panneaux en contrefaçon de son brevet. Elle sollicite plus de 20 Millions d’euros de dommages et intérêts sur la base des documents et pièces saisies en demandant au Tribunal qu’il condamne non seulement le fabricant des produits, mais également notre client, importateur distributeur.

Les faits :

A l’étude du dossier et des arguments développés par le demandeur pour obtenir l’autorisation de faire pratiquer la saisie-contrefaçon, nous avons identifié des moyens pour tenter de « faire tomber » les saisies contrefaçon. Nous avons ainsi engagé une procédure de référé rétractation au mois de janvier 2022 devant le Tribunal judiciaire de Paris pour demander la rétractation des ordonnances rendues en février 2021.

Le Tribunal a fait droit à nos demandes et la rétractation a été ordonnée en juin 2022. La partie adverse a interjeté appel de cette décision. Sur notre demande, la Cour d’appel a récemment débouté la partie adverse de son appel et a confirmé l’ordonnance (La décision n’est pas encore définitive et susceptible d’un pourvoi en cassation).

Notre argumentation principale réside dans le fait que le breveté n’a pas informé loyalement le juge des éléments du dossier aux fins d’obtenir la mesure de saisie-contrefaçon sollicitée, de sorte que les ordonnances rendues l’ont été en violation du principe de loyauté de la preuve visé à l’article 9 du Code de procédure civile et à l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme et des libertés fondamentales.

Nous avons ainsi soutenu que, lors du dépôt de sa requête aux fins de saisie-contrefaçon, le breveté avait caché certaines informations essentielles relatives à la procédure d’opposition en cours devant l’OEB, en particulier, un avis préliminaire rendu par la division d’opposition peu de temps avant la demande de saisie, avis au terme duquel l’examinateur doutait de la validité du brevet et demandait aux parties de s’exprimer sur le sujet lors de la séance orale (laquelle devait se tenir après la date à laquelle le Tribunal a été saisi de la demande de saisie contrefaçon). La partie adverse estimait au contraire qu’un avis préliminaire n’avait pas de valeur probante et se fondait sur une décision antérieure contraire de l’OEB.

La Cour a suivi notre raisonnement et a considéré que le fait pour la partie adverse de ne pas avoir transmis au Tribunal la totalité des informations nécessaires à son appréciation des faits était effectivement contraire au principe de loyauté de la preuve.

Elle a donc confirmé la décision du Tribunal, de sorte que les ordonnances fondant les saisies contrefaçon sont réputées n’avoir jamais existé, et que l’ensemble des pièces et documents saisis a dû être restitué à notre cliente.

Cela signifie également que la partie adverse a été obligée de retirer des débats au fond l’intégralité des pièces émanant de ces saisies et ne dispose plus de ces éléments pour prouver les faits de contrefaçon par importation allégués à l’encontre de notre client.

L’avis Bignon Lebray :

Sans notre intervention, les ordonnances fondant les saisies n’auraient pas été rétractées, et la partie adverse aurait pu utiliser les pièces et documents saisis dans les locaux de notre cliente, pour tenter d’obtenir sa condamnation. En l’état et sauf à ce qu’elle se procure de nouvelles pièces, elle ne dispose plus d’éléments en ce sens, l’enjeu étant de plus de 20 millions d’euros.