04/08/2020

Atteinte à la marque de l’UE et stockage de produits confiés par un tiers : la CJUE donne raison à Amazon

Dans un arrêt rendu récemment, la Cour de justice de l’Union européenne (« CJUE ») a eu l’occasion de se prononcer sur l’entreposage de produits contrefaisants pour un tiers (CJUE, C-567/18, 2 avril 2020, Coty v. Amazon).

Le litige au principal oppose Coty à Amazon : un tiers vend via une marketplace du site www.amazon.de des flacons de parfum DAVIDOFF, malgré les droits que détient Coty, en tant que titulaire d’une licence de marque, sur ces produits. Un acheteur test de Coty a acheté l’un desdits flacons auprès du vendeur tiers. Au terme du processus d’achat, le contrat de vente est conclu entre l’acheteur et le vendeur tiers, et non pas avec Amazon. Le vendeur participait au programme mis en œuvre par Amazon appelé « Expédiée par Amazon » : dans le cadre de ce programme, Amazon entrepose des produits confiés par des vendeurs tiers et les expédie aux acheteurs. Amazon, qui entreposait donc les flacons de parfum dans ses entrepôts, a alors expédié le flacon à l’acheteur final.

Après divers échanges entre Coty, le vendeur tiers et Amazon, Coty a assigné Amazon pour atteinte à la marque DAVIDOFF. Les juridictions allemandes ont rejeté l’action de Coty, estimant, notamment, qu’Amazon n’avait pas entreposé les produits contrefaisants pour son compte, mais pour le compte des tiers qui les lui avaient confiés.

Coty a formé un pourvoi devant la haute juridiction allemande (le Bundesgerichtshof) qui a sursis à statuer afin de solliciter l’interprétation de la CJUE sur l’article 9 du Règlement 2017/1001. En d’autres termes, la juridiction allemande interrogeait la CJUE sur le point de savoir si une personne qui stocke pour un tiers des produits portant atteinte à un droit de marque sans avoir connaissance de cette atteinte, porte elle-même atteinte au droit de marque, par l’acte de stockage.

Comme le rappelle la CJUE, le droit de marques confère à son titulaire le droit exclusif d’interdire à tout tiers de faire usage, dans la vie des affaires, d’un signe identique à cette marque pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée. Cela comprend le fait « d’offrir les produits ou de les mettre dans le commerce ou de les détenir à ces fins » (article 9 du Règlement 2017/1001).

La question était donc de savoir si le fait, pour Amazon, de stocker un produit contrefaisant pour un tiers équivalait à détenir ledit produit pour le mettre dans le commerce ou pour les offrir à la vente.

  • La CJUE répond par la négative et affirme clairement qu’ « une personne qui entrepose pour un tiers des produits portant atteinte à un droit de marque sans avoir connaissance de cette atteinte doit être considérée comme ne détenant pas ces produits aux fins de leur offre ou de leur mise dans le commerce […], si cette personne ne poursuit pas elle-même ces finalités».

Le simple fait de stocker des produits confiés par un tiers ne permet donc pas d’affirmer qu’une atteinte au droit de marque est constituée : le stockage n’équivaut donc pas à la détention des produits aux fins de leur offre ou de leur mise dans le commerce au sens du Règlement 2017/1001.

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