Brexit : les conséquences de la fin de la période de transition pour les titres britanniques placés en PEA
Entre le 31 janvier 2020, date à laquelle le Royaume-Uni est sorti de l’Union Européenne (« UE »), et le 31 décembre 2020, le Royaume-Uni a bénéficié d’une période de transition durant laquelle il était toujours considéré d’un point de vue fiscal comme un Etat membre de l’UE.
Ainsi, les titres de sociétés britanniques restaient éligibles aux régimes du Plan d’Epargne en Actions classique et du Plan d’Epargne en Actions PME-ETI (« PEA classique » et « PEA PME-ETI »). Pour rappel, ces PEA ne peuvent être composés que de titres de sociétés établies dans l’Espace Economique Européen (« EEE ») et de parts ou actions d’organismes de placements collectifs (« OPC ») établis dans l’EEE dont l’actif est investi à plus de 75 % dans des titres de ces sociétés.
Depuis le 1er janvier 2021, le Royaume-Uni est considéré comme un Etat tiers à l’UE, et ne fait plus partie de l’EEE.
L’ordonnance 2020-1595 du 16 décembre 2020, complétée par un arrêté du 22 décembre 2020, tire les conséquences de ce changement de statut en excluant des titres éligibles aux régimes du PEA à compter du 1er janvier 2021 :
- les titres de sociétés britanniques ;
- les titres d’OPC britanniques et ;
- les titres d’OPC européens qui ne respecteraient plus le quota d’investissement de 75% en titres de société de l’EEE, du fait de la perte d’éligibilité des titres britanniques qu’ils détiennent.
Toutefois, l’ordonnance aménage avec une certaine souplesse le sort des titres acquis avant le 31 décembre 2020, en prévoyant qu’ils demeureront éligibles aux deux PEA pour une période de neuf mois, expirant au 30 septembre 2021. Les titres visés par cette prolongation sont les suivants :
- les titres de sociétés britanniques acquis ou souscrits avant le 31 décembre 2020 ;
- les parts ou actions d’OPC britanniques souscrites avant le 31 décembre 2020 respectant les conditions d’éligibilité au PEA à la date du 17 décembre 2020 ;
- les parts ou actions d’OPC européens respectant les conditions d’éligibilité au PEA à la date du 17 décembre 2020 et dont le quota d’investissement de 75% en titres de société de l’EEE ne serait pas ou plus atteint du fait de la perte d’éligibilité des titres britanniques qu’ils détiennent.
Par conséquent, les titres de sociétés et d’OPC britanniques devront être vendus ou transférés sur un compte-titres ordinaire. Il en va de même des parts ou actions d’OPC européens qui ne modifieraient pas la composition de leurs actifs pour rester éligibles. A défaut de procéder à de telles cessions, la clôture du PEA est encourue.
Aucune précision n’est donnée par l’ordonnance et l’arrêté sur les conséquences fiscales de tels transferts et cessions. On le rappelle, les retraits de titres opérés sur un PEA de moins de cinq ans entraînent théoriquement sa clôture et l’imposition des revenus réalisés au sein du PEA au taux de 30% (12,8% d’impôt sur le revenu et 17,2% de prélèvements sociaux), tandis que les retraits de titres opérés sur un PEA de plus de cinq ans sont sans effet sur la validité du PEA et exonérés d’impôt sur le revenu, mais pas des prélèvements sociaux.
En dépit du silence de ces textes, il y a lieu de penser que de telles opérations devraient pouvoir bénéficier des mesures de tolérance publiées dans la doctrine administrative. Ces mesures prévoient qu’à titre exceptionnel les titres inscrits dans un PEA qui deviennent inéligibles à la suite d’un événement indépendant de la volonté du titulaire du plan n’entrainent pas la clôture du plan, y compris si l’inéligibilité intervient moins de cinq ans après l’ouverture du plan.
Cette tolérance administrative prévoit que les titulaires du plan disposent de deux options pour éviter la clôture du PEA :
- céder les titres inéligibles dans le cadre du PEA. Dans ce cas, l’impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux ne sont applicables que sur la fraction de la plus-value qui a été générée à partir de la date à laquelle les titres cédés ont été considérés comme inéligibles. La fraction de la plus-value générée entre l’ouverture du PEA et la date d’inéligibilité demeure exonérée.
- Transférer les titres inéligibles sur un compte-titres, et procéder sur le PEA à un versement compensatoire en numéraire d’un montant égal à la valeur des titres appréciée à cette même date. Dans ce cas, les plus-values de cession ultérieures de ces titres seront imposées dans les conditions de droit commun, sans bénéficier d’aucune exonération liée au placement antérieur sur le PEA.
Cette alternative et le traitement fiscal de chacune des deux hypothèses devraient conserver toute leur pertinence au cas présent. Cependant, il convient de noter que cette tolérance administrative n’est applicable que dans des circonstances limitativement énumérées dans le bofip, dont le Brexit ne fait toujours pas partie à ce jour. Une confirmation rapide de l’administration fiscale serait donc bienvenue.
On précisera également que l’ordonnance intègre d’autres mesures de tempérament. Leur objectif est de permettre que les titres britanniques acquis par des fonds de capital investissement (FCPR, FCPI et FIP) avant le 31 décembre 2020 et conservés pendant une certaine période au-delà de cette date ne remettent pas en cause les avantages fiscaux dont bénéficient les porteurs de parts desdits fonds.
Enfin, il convient de noter que ces dispositions restent susceptibles d’évoluer dans la mesure où l’accord commercial signé entre le Royaume-Uni et l’UE le 24 décembre 2020 ne vise pas les services financiers.Ceux-ci feront encore l’objet de négociations spécifiques qui pourront théoriquement s’étaler jusqu’au mois de mars 2021.
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