Délai de réclamation et décisions du Conseil Constitutionnel : un avis attendu
Le 9 octobre dernier, le tribunal administratif de Montreuil a transmis au Conseil d’Etat une demande d’avis relative au délai de prescription du droit de réclamation dans deux affaires distinctes (TA Montreuil 9e chambre, 9 octobre 2018 n°1704287 et n°1801500).
La rédaction actuelle de l’article R 196-1 du Livre des Procédures Fiscales (« LPF ») prévoit que « les réclamations relatives aux impôts directs autres que les impôts locaux doivent être déposées au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant : la réalisation de l’évènement qui motive la réclamation ».
Cette notion « d’évènement » ne peut concerner une décision juridictionnelle ou un avis mentionnés dans une liste limitative (Décision du Conseil d’Etat, arrêts de la Cour de Cassation, du tribunal des conflits et de la CJUE). Cette liste ne fait toutefois pas mention des décisions du Conseil Constitutionnel.
En l’espèce les deux sociétés requérantes soulevaient la possibilité d’effectuer une réclamation au regard de deux décisions du Conseil Constitutionnel du : (i) 19 mai 2017 n°2017-629-QPC relative au taux effectif de CVAE pour des sociétés faisant partie d’une intégration fiscale et du (ii) 6 octobre 2017 n°2017-660- QPC relative, à la contribution de 3% sur les dividendes. Dans ces deux décisions, le Conseil Constitutionnel avait précisé que sa position était « applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date ».
Ainsi, devant le Tribunal Administratif de Montreuil, la question transmise au Conseil d’Etat était la suivante :
« Une décision du Conseil Constitutionnel constatant la non-conformité à la Constitution d’une disposition législative, rendue à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité, constitue-t-elle une décision juridictionnelle mentionnée au troisième alinéa de l’article 190 du Livre des Procédures fiscales insusceptible à ce titre de constituer un événement propre à motiver une réclamation en matière d’impôts directs de nature à faire courir le délai de réclamation ? »
Même si le législateur a pris le soin de dresser une liste des décisions/arrêts considérés comme des décisions juridictionnelles au sens de l’article 190 du LPF, la question posée et à laquelle le Conseil d’Etat va devoir répondre est celle de savoir s’il s’agit d’une liste ouverte pouvant inclure les décisions du Conseil Constitutionnel.
Cet avis du Conseil d’Etat aura de l’importance car si les décisions du Conseil constitutionnel sont des événements de nature à ouvrir un nouveau délai de réclamation, des nouvelles opportunités s’ouvriront pour les contribuables qui pourront alors déposer des réclamations au titre d’années considérées aujourd’hui comme prescrites.