03/02/2022

Le seul dépôt de marque ne constitue pas un acte de contrefaçon !

Par deux arrêts du 13 octobre 2021 la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence en considérant que le seul dépôt d’une marque ne saurait constituer à lui seul un acte de contrefaçon.

Dans ces deux affaires, se posait la question de savoir si la demande d’enregistrement d’un signe similaire à une marque antérieure, indépendamment de toute autre utilisation ou exploitation de ce signe, pouvait constituer un acte de contrefaçon.

Jusqu’à présent, la jurisprudence de la Cour de cassation était claire et constante : le simple fait de solliciter l’enregistrement à titre de marque d’un signe similaire à une marque antérieure était susceptible de constituer un acte de contrefaçon, peu important l’absence d’usage dans la vie des affaires.

La Cour opère un net revirement, sous l’influence de la jurisprudence européenne. Après avoir rappelé le sens de sa jurisprudence antérieure, la Cour se conforme à l’interprétation de la CJUE et considère que la demande d’enregistrement d’un signe en tant que marque, même lorsqu’elle est accueillie, ne caractérise pas un usage pour des produits ou des services, en l’absence de tout début de commercialisation de produits ou services sous le signe.

La Cour souligne également qu’en pareil cas, aucun risque de confusion dans l’esprit du public et, par conséquent, aucune atteinte à la fonction essentielle d’indication d’origine de la marque, ne sont susceptibles de se produire.

Il en découle que la demande d’enregistrement d’un signe en tant que marque ne constitue pas un acte de contrefaçon, faute d’exploitation du signe second à titre de marque.

D’un point de vue pratique, si le dépôt d’un signe similaire à une marque antérieure ne peut plus être sanctionné sur le terrain de la contrefaçon devant le juge judiciaire, ce dépôt reste sanctionnable via une procédure d’opposition ou de nullité sur le fondement de l’article L.711-3 du Code de la propriété intellectuelle, une telle action pouvant désormais être engagée directement devant l’INPI.

Le seul dépôt d’un signe à titre de marque ne constitue pas un acte de contrefaçon. Il est dès lors nécessaire d’apporter la preuve de l’exploitation commerciale de la marque et, a minima, d’un début de commercialisation des produits et services sous le signe.

Cass. Com., 13 octobre 2021, n° 19-20959 et n°19-20504