27/06/2019

Droit d’auteur : banalité, originalité et préjudice en matière de concurrence déloyale

Par un arrêt en date du 10 avril 2019, la Cour de cassation a rappelé les principes essentiels en matière de droit d’auteur relatifs à l’appréciation de l’originalité d’une œuvre et de la réparation du préjudice en matière de concurrence déloyale (Cass, civ 1ère, 10 avril 2019, n°18-13612).

La société Universal Music France a réédité entre 2003 et 2009 les enregistrements d’un chanteur dans leurs pochettes d’origine. La maison de disques a assigné l’éditeur de presse Mondadori Magazines France en contrefaçon, concurrence déloyale et parasitaire au motif que les pochettes de CD distribués par l’éditeur en 2013 reproduisaient les caractéristiques originales des pochettes de disques dont Universal déclarait être investie des droits d’auteurs.

La Cour d’appel de Versailles, dans un arrêt en date du 24 novembre 2017, avait rejeté d’une part la demande en contrefaçon de la maison de disques au motif que l’originalité des pochettes revendiquées n’était pas établie et d’autre part la demande en concurrence déloyale au motif que la société ne justifiait nullement que la commercialisation des pochettes litigieuses lui aurait causé un préjudice quelconque.

La question se posait de savoir si d’une part l’originalité d’une pochette de disque peut être tirée de la combinaison d’un ensemble d’éléments banals et d’autre part si le préjudice en matière de concurrence déloyale s’infère nécessairement de l’acte de concurrence déloyale ?

La Cour de cassation a répondu par la positive dans son arrêt du 10 avril 2019.

L’appréciation de l’originalité

La Cour d’appel de Versailles avait considéré que l’originalité des pochettes de disques n’était pas établie au motif que : « la typographie est banale, que l’indication du nom de l’artiste en lettres capitales jaune primaire, légèrement arrondies ne témoigne d’aucune singularité artistique, que la typographie joue sur l’alternance de couleurs plus ou moins vives et variées dont il résulte une impression de gaieté propre aux années « yéyé », sans qu’aucun de ces éléments soit de nature à témoigner de l’empreinte de la personnalité de leur auteur, qu’il en est de même de l’emplacement des titres dans un bandeau horizontal, caractéristique des disques des années 60 et que cette absence d’originalité est confirmée par des spécimens d’autres pochettes de disques de ces années où l’on retrouve pareillement couleurs vives, bandeaux et décalage horizontal de certaines lettres ».

Or, la Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel et rappelle le principe bien établi en jurisprudence selon lequel l’originalité d’une œuvre doit être appréciée dans son ensemble au regard de la combinaison des différents éléments, mêmes banals, la composant.

La preuve du préjudice en matière de concurrence déloyale

La Cour d’appel de Versailles avait rejeté la demande de réparation d’actes de concurrence déloyale au motif que la maison de disques ne justifiait nullement que la commercialisation des pochettes litigieuses lui aurait causé un préjudice quelconque.

La Cour de cassation casse également l’arrêt de la Cour d’appel sur ce point et rappelle que le préjudice s’infère nécessairement d’un acte de concurrence déloyal. En outre, dès lors que le demandeur a prouvé l’existence d’une faute de concurrence déloyale par création d’un risque de confusion, le préjudice est établi.

Aussi, cet arrêt permet de rappeler les principes fondamentaux en matière de droit d’auteur et leurs applications strictes par les tribunaux.