Illégalité d’un régime d’aides prononcée par voie d’exception par la juridiction judiciaire interne
Cour d’appel, Aix-en-Provence, 22 Novembre 2018, n° 14/24264
La Cour d’appel d’Aix-en-Provence (la « Cour d’appel ») a rendu un arrêt le 22 novembre 2018 (n°14/24264) par lequel elle s’est prononcée par voie d’exception sur la légalité du mécanisme d’obligation d’achat d’électricité produite par les installations utilisant l’énergie radiative instauré par l’arrêté du 12 janvier 2010.
A l’occasion d’un litige indemnitaire, une société demandait au juge judiciaire de condamner une autre société à l’indemniser de sa perte d’exploitation calculée sur la base de l’arrêté précité. La société défenderesse a alors invoqué l’exception d’illégalité de l’arrêté du 12 janvier 2010.
Pour répondre à ce moyen, la Cour d’appel s’est appuyée sur une ordonnance du 15 mars 2017 de la CJUE, répondant à une question préjudicielle posée par la Cour d’appel de Versailles sur une affaire similaire. La CJUE avait jugé que la réglementation nationale française instaurant ce mécanisme d’obligation d’achat à un prix supérieur à celui du marché et dont le financement était supporté par les consommateurs finals d’électricité devait être considéré comme une intervention de l’Etat ou au moyen de ressources d’Etat. Bien que la CJUE ait jugé que la condition de « au moyen de ressources d’Etat » de l’article 107§1 du TFUE soit remplie, elle avait précisé qu’il revenait toutefois à la juridiction nationale saisie de se prononcer sur les trois autres conditions de l’article 107§1 du TFUE.
Ainsi, reprenant ce raisonnement, la Cour d’appel vient constater que le dispositif remplit les trois autres conditions. Elle considère, à cet égard, que (i) les producteurs d’électricité d’origine photovoltaïque sont bénéficiaires d’un tarif d’achat avantageux qui a pour effet de leur procurer un avantage consistant en la garantie de rentabilité de leur investissement, (ii) cet avantage est sélectif car il favorise la production d’énergie d’origine photovoltaïque qui n’est qu’un type de production parmi d’autres et enfin, (iii) cet avantage est susceptible d’avoir une incidence sur la concurrence et d’affecter les échanges entre États membres compte tenu du caractère transfrontalier du marché de l’électricité et de sa libéralisation au niveau du marché intérieur.
La Cour d’appel juge alors que l’arrêté du 12 janvier 2010, qui n’a jamais été notifié à la Commission, est entaché d’illégalité. Dès lors, l’illégalité fait obstacle à elle seule à une demande d’indemnisation fondée sur cet arrêté et, ce, indépendamment de sa compatibilité ou incompatibilité avec le marché intérieur que seule la Commission peut apprécier.