05/07/2017

Justification du taux d’intérêt pratiqué sur un prêt intragroupe

Le Tribunal administratif de Montreuil* vient de statuer sur la preuve qu’il convient d’apporter pour justifier que le taux pratiqué entre deux sociétés liées à raison d’un prêt intragroupe est conforme au taux de marché, lorsque ce taux est supérieur au taux maximum des intérêts déductibles stipulé à l’article 39, 1-3° du Code général des impôts.

Une société française avait contracté plusieurs emprunts auprès d’une société luxembourgeoise qui lui était liée (au sens de l’article 39, 12 du Code général des impôts). Lors d’un contrôle, l’administration fiscale avait constaté que les taux effectifs (variables) pratiqués sur ces prêts intragroupes étaient supérieurs au taux maximum des intérêts déductibles édicté à l’article 39, 1-3° précité. Elle avait donc réintégré les charges financières correspondant au différentiel de taux dans l’assiette de l’impôt de l’emprunteuse.

S’agissant des prêts consentis entre entreprises liées, l’article 212, I du Code général des impôts prévoit un dispositif de rattrapage. En effet, dans l’hypothèse où le taux stipulé dépasse le taux maximum des intérêts déductibles, la déduction est admise si l’entreprise emprunteuse justifie que le taux pratiqué est conforme au taux que cette entreprise « aurait pu obtenir d’établissements ou d’organismes financiers indépendants dans des conditions analogues ». En cas de contrôle, il appartient donc à l’emprunteuse d’apporter toutes justifications à cet égard.

En pratique, on sait que l’administration fiscale exige le plus souvent la production par l’entreprise emprunteuse d’une ou plusieurs offres de prêt contemporaines. La doctrine administrative indique, à cet égard, que « la preuve sera considérée comme apportée si l’entreprise justifie, par exemple, d’une offre de prêt à la date à laquelle cet emprunt a été contracté » (BOI-IS-BASE-35-20-10 n° 100 et 110, 29 mars 2013). Or, l’obtention de telles cotations d’organismes financiers est souvent délicate, voire impossible, notamment lorsque l’entreprise emprunteuse n’a plus d’actifs à offrir en gage de premier rang.

Au cas particulier, le contribuable s’était défendu en produisant des études analytiques qui décomposaient les taux en trois variables : le swap (taux variable/taux fixe), la prime d’annulation (différence de taux swapé entre un swap avec option de remboursement anticipé et un swap sans option) et la marge de crédit. Pour le swap, l’entreprise produisait une courbe historique observée sur les marchés ; pour la prime d’annulation, une étude des différentiels de taux observés sur le marché était semble-t-il fournie, et pour la marge de crédit l’entreprise s’appuyait sur des comparables internes, c’est-à-dire des taux qu’elle avait obtenus pour des crédits souscrits par ailleurs auprès d’organismes financiers indépendants durant la période vérifiée pour des durées analogues.

Le tribunal a accueilli favorablement la justification apportée par le contribuable, en considérant que l’administration fiscale n’était pas fondée à exiger de l’emprunteuse une offre de prêt contemporaine des opérations, la pertinence des taux d’intérêt pratiqués pouvant être démontrée par des études.

* TA Montreuil, 1re ch., 30 mars 2017, n°1506904, Sté BSA.