22/01/2019

Fiscalité internationale : la CJUE juge qu’aucune retenue à la source n’est due sur les dividendes versés à une société non-résidente déficitaire.

CJUE, 22 novembre 2018, C-575/17, Sofina SA e.a. contre Ministre de l’Action et des Comptes publics

La Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) vient de rendre sa décision dans le cadre de l’application d’une retenue à la source aux dividendes versés par des sociétés françaises à des sociétés étrangères déficitaires.

Dans l’affaire en cause, trois sociétés résidentes belges, ne relevant pas du régime mère-fille, ont perçu, au cours des années 2008 à 2011, des dividendes de sociétés françaises. Ces dividendes ont fait l’objet d’une retenue à la source, au taux de 15%, en application de l’article 119 bis du CGI et de l’article 15 de la convention fiscale franco-belge.

Cependant, ces sociétés belges étant déficitaires, elles ont demandé à l’administration fiscale française la restitution de ces retenues à la source, au motif qu’elles seraient moins bien traitées par rapport à des sociétés résidentes déficitaires.

Ces demandes de restitution ont été successivement rejetées par l’administration, par le tribunal administratif et par la cour administrative d’appel saisis du litige.

Le Conseil d’Etat, saisi du litige, a renvoyé le 20 septembre 2017, une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne (« CJUE ») sur ce point.

Par un arrêt du 22 novembre 2018, la CJUE donne raison aux contribuables, en jugeant que les articles 63 et 65 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (« TFUE ») s’opposent à une législation : « en vertu de laquelle les dividendes distribués par une société résidente font l’objet d’une retenue à la source lorsqu’ils sont perçus par une société non-résidente, alors que, lorsqu’ils sont perçus par une société résidente, leur imposition selon le régime de droit commun de l’impôt sur les sociétés ne se réalise à la fin de l’exercice au cours duquel ils ont été perçus qu’à la condition que le résultat de cette dernière société ait été bénéficiaire durant cet exercice, une telle imposition pouvant, le cas échéant, ne jamais intervenir si ladite société cesse ses activités sans avoir atteint un résultat bénéficiaire depuis la perception de ces dividendes ».

La CJUE précise, par ailleurs, qu’une restriction à la libre circulation des capitaux résultant d’une telle règlementation ne peut être justifiée ni par l’écart entre le taux d’imposition de droit commun mis à la charge des résidents et la retenue à la source prélevés pour les non-résidents, ni par la nécessité de garantir l’efficacité du recouvrement de l’impôt.

La CJUE estime qu’une telle différence de traitement fiscal des dividendes en fonction du lieu de résidence des sociétés est susceptible de dissuader les sociétés non-résidentes de procéder à des investissements dans des sociétés établies en France ou dans d’autres Etats membres.

Cette décision de la CJUE ouvre ainsi la possibilité aux sociétés déficitaires établies hors de France de demander la restitution des retenues à la source prélevées sur des dividendes perçus de sociétés françaises.

Le délai de réclamation court jusqu’au :

 – 31 décembre de la 2ème année suivant celle du versement de la retenue à la source, si la réclamation est présentée par la société versante ;

 – 31 décembre de l’année suivant celle du versement de la retenue à la source, si la réclamation est présentée par la société ayant reçu le dividende.