16/01/2019

Loi de finances 2019 : l’Administration dispose de nouveaux moyens pour contester des schémas avantageux

La Loi de finances 2019 a instauré, d’une part, une clause anti-abus générale en matière de l’impôt sur les sociétés (I), et d’autre part, une procédure de « mini-abus de droit » pour les montages poursuivant un but principalement fiscal.

I) La clause anti-abus générale en matière de l’impôt sur les sociétés

Le nouvel article 205 A du Code général des impôts dispose :
« Pour l’établissement de l’impôt sur les sociétés, il n’est pas tenu compte d’un montage ou d’une série de montages qui, ayant été mis en place pour obtenir, à titre d’objectif principal ou au titre d’un des objectifs principaux, un avantage fiscal allant à l’encontre de l’objet ou de la finalité du droit fiscal applicable, ne sont pas authentiques compte tenu de l’ensemble des faits et circonstances pertinents ».
Le texte a vocation à s’appliquer à toutes les opérations relevant de l’impôt sur les sociétés, à l’exclusion des opérations de fusion ou assimilées où il existe déjà une clause anti-abus spécifique.
Il ressort de ce texte que les conditions suivantes doivent être réunies pour son application :
1) Le montage doit avoir pour but principal ou au titre d’un de ses objectifs principaux d’obtenir un avantage fiscal allant à l’encontre de l’objet ou de la finalité du droit fiscal applicable
2) Le montage doit être considéré comme non-authentique

Ainsi, pour éviter l’application de la clause d’anti-abus générale, le contribuable doit démontrer que l’opération a été effectuée pour des « motifs commerciaux valables » (clause de sauvegarde).
Cette clause anti-abus s’applique aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019. Toutefois, l’Administration n’a pas précisé si la clause a vocation à s’appliquer pour des montages mis en place antérieurement à son entrée en vigueur mais qui ont des effets postérieurement.
La rédaction de la clause anti-abus est relativement proche de celle applicable au régime mère fille (texte abrogé avec la Loi de finances 2019). Il est donc probable que les commentaires administratifs relatifs la clause anti-abus propre au régime mère-fille soient transposés à la clause anti-abus générale en matière de l’impôt sur les sociétés.
L’Administration fiscale dans sa doctrine concernant la clause anti-abus pour le régime mère-fille précisait que « l’analyse du caractère principal d’un des objectifs résulte d’une appréciation de fait tenant notamment compte de l’évaluation de l’avantage fiscal qui serait obtenu à l’encontre de la finalité du régime d’exonération des dividendes, en proportion de l’ensemble des gains ou avantages de toute nature obtenus par le montage considéré » (BOI-IS-BASE-10-10-10-10).
Il ressort que la notion d’« objectif principal » est source d’insécurité juridique pour le contribuable. En effet, une telle notion permet une interprétation subjective de la part de l’Administration fiscale lui laissant une marge d’appréciation importante.

II) Le « mini abus de droit » pour les montages poursuivant un but principalement fiscal

Le législateur a adopté un nouvel article L 64 A du livre des procédures fiscales (LPF) afin de sanctionner les montages poursuivant un but principalement fiscal. Ce texte dispose d’un champ d’application plus large par rapport à la clause anti-abus en matière d’impôt sur les sociétés.
Il est à noter que le nouveau mécanisme prévu par l’article L64 A du LPF ne s’applique qu’aux rectifications notifiées à compter du 1er janvier 2021 portant sur des actes passés ou réalisés à compter du 1er janvier 2020.
Le mécanisme prévu par l’article L64 A du LPF constitue une règle d’assiette, non assortie de pénalités automatiques contrairement à l’abus de droit prévu par l’article L64 du LPF.
L’article L64 A du LPF prévoit que l’Administration fiscale peut écarter comme ne lui étant pas opposable « les actes qui, recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ont pour motif principal d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, si ces actes n’avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ».
Ce texte permettra à l’Administration fiscale de contester plus facilement certaines opérations. En effet, le champ d’application de ce texte est beaucoup plus large par rapport à celui de l’article L64 du LPF (abus de droit). Pour l’application du nouveau texte, il faut simplement être en présence d’un « but principalement fiscal » et non plus d’un but « exclusivement fiscal ».
Cet article offre une très grande latitude à l’Administration pour remettre en cause les opérations, notamment patrimoniales.
Il convient dès lors d’être très prudent lors de la mise en place d’opérations procurant des avantages fiscaux significatifs.