21/02/2020

Une Intelligence Artificielle ne peut être inventeur d’un brevet ?

L’Office Européen des Brevets (OEB) a refusé deux demandes de brevet européen dont l’inventeur est une intelligence artificielle.

Même si un certain débat agite le monde de la propriété industrielle sur la question de savoir s’il est possible d’obtenir des brevets pour des idées générées par l’IA, aucune loi n’a été votée à ce propos.

Cependant, certains développeurs spécialistes de l’IA et notamment l’équipe du projet « Artificial inventors » ont voulu forcer la main des offices de brevets à l’été 2019. En effet, deux demandes de brevets ont été soumises aux offices du Royaume-Uni, des Etats-Unis et Européen au nom d’un inventeur baptisé DABUS.

DABUS est décrite comme « un type d’intelligence artificielle connexionniste ». Le demandeur a déclaré qu’il avait acquis le droit au brevet européen auprès de l’inventeur en étant son successeur en titre.

DABUS a, sans intervention humaine, mis au point deux inventions : un nouveau type de récipient à boissons basé sur la géométrie fractale et un dispositif basé sur une lumière vacillante pour attirer l’attention pendant les opérations de recherche et de sauvetage.

L’équipe du projet « Artificial inventors » soutient que « l’inventeur ne devrait pas être limité aux personnes physiques » et qu’« une machine qui répondrait aux critères de propriété de l’invention si elle était une personne physique devrait également être considérée comme un inventeur ».

Après avoir entendu les arguments de la requérante lors d’une procédure orale non publique le 25 novembre dernier, l’OEB a refusé les brevets EP18275163 et EP18275174 au motif qu’ils ne remplissaient pas la condition de la Convention sur le Brevet Européen selon laquelle un inventeur doit être une personne physique et non une machine. Pour l’OEB, la désignation d’un inventeur est obligatoire car elle produit plusieurs effets juridiques et permet notamment de garantir que la personne désignée est bien l’inventeur légitime et peut bénéficier des droits associés à cette qualité. Or, pour exercer de tels droits, l’inventeur doit avoir une personnalité juridique, ce qui n’est pas le cas des machines ou systèmes dotés d’intelligence artificielle.

Ryan Abbott, professeur en IA faisant partie de ceux ayant tenté de déposer ces deux brevets estime que les lois actuelles sur la propriété industrielle doivent évoluer car « le manque d’incitation pour les développeurs d’IA pourrait faire obstacle à une nouvelle ère d’efforts humains spectaculaires. »

On peut penser que cette décision fera office de jurisprudence même si certains experts affirment qu’elle pourrait avoir l’effet inverse et aboutir à la multiplication des dépôts de brevets générés par l’IA.

Le demandeur dispose à présent d’un délai de deux mois pour, s’il le souhaite, former un recours contre ces décisions.

Liens utiles :

https://register.epo.org/application?documentId=E4B63SD62191498&number=EP18275163&lng=en&npl=false

https://register.epo.org/application?documentId=E4B63OBI2076498&number=EP18275174&lng=en&npl=false