07/01/2020

Précisions sur la notion de « holding animatrice »

La chambre commerciale de la Cour de Cassation est récemment venue préciser la notion d’holding animatrice par cinq décisions rendues le 19 juin 2019.

Si l’ensemble des arrêts concernaient l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), supprimé par le législateur et remplacé depuis le 1er janvier 2018 par le nouvel impôt sur la fortune immobilière (IFI), la qualification de holding animatrice ne se cantonne pas à cette matière : elle permet encore aujourd’hui d’ouvrir droit à différents régimes de faveur tels que (i) l’exonération sous certaines conditions de l’immobilier détenu directement ou indirectement par une telle société en matière d’IFI, (ii) l’exonération des droits de mutation à titre gratuit dans le cadre de la conclusion de Pacte Dutreil ou encore (iii) la réduction d’impôt sur le revenu dite « Madelin » en cas d’investissements dans des PME non cotées.

Au cas particulier, les contentieux concernaient les exonérations d’ISF applicables en vertu du dispositif des biens professionnels (exonération totale), d’une part, et du régime du pacte Dutreil (exonération à hauteur de 75% de la valeur des titres détenus dans des holdings animatrices lorsque les titres d’une des filiales font l’objet d’un engagement collectif de conservation), d’autre part. Pour rappel, ces dispositifs s’appliquaient, par tolérance de l’administration fiscale, aux sociétés holding animatrices, assimilées pour les besoins de la cause à des sociétés commerciales opérationnelles.

Dans les différents litiges soumis à la juridiction suprême les faits étaient les suivants : les associés personnes physiques détenaient les titres d’une holding détenant elle-même des participations majoritaires et minoritaires au sein de différentes filiales.

Si la holding animait ses filiales dans lesquelles elle détenait une participation majoritaire, il n’en était pas de même pour ses participations minoritaires, la holding n’exerçant pour ces dernières que des prérogatives d’actionnaires, à l’exclusion donc de tout rôle d’animation.

L’administration fiscale a notifié une proposition de rectification aux associés concernés, en considérant que ceux-ci ne pouvaient pas bénéficier des régimes d’exonération d’ISF relevés ci-dessus applicables aux participations dans une holding animatrice, dans la mesure où, dans chacune des espèces examinées, la holding animatrice détenait une participation minoritaire dans une filiale dans laquelle elle n’exerçait qu’un rôle « passif ». Selon la position qui était retenue par les services fiscaux, une holding ne peut être animatrice que dans la mesure où elle anime effectivement chacune de ses filiales.

Pour l’ensemble des litiges qui lui ont été soumis, la chambre commerciale de la Cour de Cassation a sanctionné la position de l’administration en jugeant que :

« Le rôle d’animation effective de la holding doit nécessairement être apprécié rigoureusement au niveau du groupe, c’est-à-dire au niveau de l’ensemble des sociétés qui composent le groupe, et non en distinguant selon les filiales afin d’exonérer celles d’entre elles pour lesquelles les conditions d’animation seraient effectivement remplies ; une société peut être qualifiée d’holding animatrice dès lors qu’elle a pour activité principale l’animation de ses filiales. Le fait qu’elle détienne une participation minoritaire dans une autre société dont elle n’assure pas l’animation n’est pas de nature à lui retirer son statut de holding animatrice. »

Ces décisions, favorables au contribuable, confirment la position récente du Conseil d’Etat (Conseil d’Etat plénière 13 juin 2018, n°395495), qui indiquait déjà que : « Une société holding qui a pour activité principale, outre la gestion d’un portefeuille de participations, la participation active à la conduite de la politique du groupe et au contrôle de ses filiales et, le cas échéant et à titre purement interne, la fourniture de services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers, est animatrice de son groupe ».

Ainsi, tant pour le Conseil d’Etat que pour la Cour de cassation, l’activité d’animation doit être exercée à titre principal, et non exclusif ; une société holding peut donc être animatrice de son groupe tout en détenant des participations minoritaires « passives » dans des filiales non animées.

Enfin, nous rappelons que la notion de holding animatrice qui était définie en matière d’ISF par la doctrine administrative (BOI-PAT-ISF-30-30-40-10 n°140) a été reprise à l’article 966 du CGI, applicable en matière d’IFI, dans les termes suivants : « Sont également considérées comme des activités commerciales les activités de sociétés qui, outre la gestion d’un portefeuille de participations, participent activement à la conduite de la politique de leur groupe et au contrôle de leurs filiales et rendent, le cas échéant et à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers. »

Les jurisprudences commentées ici sont donc pleinement transposables à l’IFI.

Cass. com. 19-6-2019 n°17-20.556 ; n°17-20.557 ; n°17-20.558 ; n°17-20.559 et n°17-20.560