17/10/2019

Régime fiscal des plus-values sur cession de titres de participation : précisions jurisprudentielles sur la notion de titres de participation

Conseil d’État, 3ème – 8ème chambres réunies, 29/05/2019, 411209

En principe, les plus-values réalisées par les sociétés soumises à l’IS sont traitées fiscalement comme un revenu imposable au taux normal de l’IS.
Par exception, les plus-values de cession de titres de participations peuvent bénéficier au plan fiscal d’un régime d’exonération quasi-totale (exonération à hauteur de 88% de la plus-value brute) lorsque les conditions suivantes sont remplies :
• les titres cédés sont des « titres de participation » ;
• les titres cédés ont été détenus au moins deux ans.

En application de l’article 219 I a quinquies du CGI, constituent des titres de participation pour l’application de ce régime :
1. les titres de participation revêtant ce caractère sur le plan comptable (« définition comptable ») ;
2. les actions acquises en exécution d’une offre publique d’achat ou d’échange par l’entreprise qui en est l’initiatrice ; et
3. les titres ouvrant droit au régime des sociétés mères à condition de détenir au moins 5 % des droits de vote de la société émettrice, si ces actions ou titres sont inscrits en comptabilité au compte titres de participation ou à une subdivision spéciale d’un autre compte du bilan correspondant à leur qualification comptable, à l’exception des titres des sociétés à prépondérance immobilière (« définition fiscale »).

Dans un arrêt du 29 mai 2019, le Conseil d’Etat a apporté des précisions sur les définitions fiscale et comptable de titres de participation.
En l’espèce, la société M, ayant pour gérant et associé unique M. C, avait acquis 5,17% du capital de la société S en 2007. Suite à une augmentation de capital de S en 2009, la participation de M a été réduite à 4,34%. En 2011, M a cédé cette participation et a appliqué le régime d’exonération précité sur la plus-value générée par cette cession.

L’administration a contesté l’application du régime fiscal des plus-values sur cession de titres de participation en considérant que les titres cédés ne constituaient pas des titres de participation, ni au plan fiscal, ni au plan comptable. Les juges du fond ont donné raison à l’administration mais le Conseil d’Etat a jugé différemment en considérant que les titres en cause répondaient à la définition comptable des titres de participation.

Précision sur la définition fiscale de titres de participation :
Tout d’abord, le Conseil d’Etat rappelle que le respect du seuil de 5%, exigé dans la définition fiscale de titres de participation, est une condition qui s’apprécie à la date de la cession des titres et non à la date d’acquisition des titres.
En l’espèce, les titres cédés représentaient 4,34% de S au moment de leur cession. Ils ne répondaient donc pas à la définition fiscale de titres de participation.
En revanche, le Conseil d’état conteste l’appréciation faite par les juges du fond et l’administration fiscale de la définition comptable de titres de participation.

Précision sur la définition comptable de titres de participation :
Au plan comptable, les titres de participation sont ceux « dont la possession durable est estimée utile à l’activité de l’entreprise, notamment parce qu’elle permet d’exercer une influence sur la société émettrice des titres ou d’en assurer le contrôle ». Cette définition, issue de l’ancien plan comptable général de 1982, a été confirmée par la jurisprudence (Conseil d’Etat, 20 mai 2016, n° 392527, min. c/ Selarl L).

Or, en l’espèce, la Cour administrative d’appel a refusé cette qualification comptable aux titres cédés, sur le double motif tiré, d’une part, de ce que les conditions d’exercice du mandat de M. C au sein du conseil de surveillance de la société S ne démontraient pas qu’il avait effectivement exercé une influence sur celle-ci, et d’autre part, du fait qu’il n’avait pas siégé dans cette instance en qualité de représentant de la société M.

Le Conseil réfute ces deux motifs en arguant que :
1. C’est l’intention de l’acquéreur au moment de l’achat des titres qui est déterminante pour qualifier ou non les titres de titres participation au plan comptable. Les juges devaient donc uniquement analyser l’intention initiale de M pour apprécier si elle entendait exercer une influence sur S et si elle avait les moyens de l’exercer. Le fait que cette influence ne soit pas matérialisée par la suite est sans incidence.
2. Le fait que le gérant et associé unique de M ait siégé au conseil d’administration de S en tant que représentant d’une autre société que M est également sans incidence. En effet, cela n’empêchait pas M. C d’agir dans l’intérêt de M et permettait donc à M d’avoir les moyens d’exercer une influence sur S.