Sociétés anonymes, garantie non autorisée par le CA : quelle responsabilité pour le dirigeant social ?
Faits
Deux sociétés (A) et (B) spécialisées dans le transport aérien de passagers ont conclu un contrat d’affrètement long et moyen-courrier avec une société (C).
Aux termes de ce contrat, il était prévu que la société (C) règlerait l’intégralité des prestations à la société (B), celle-ci devant rétrocéder à la société (A) la part lui revenant.
Par la suite, une banque a accordé une ouverture de crédit à la société (A) pour lui permettre de faire face aux obligations résultant du contrat d’affrètement ; que le même jour ont été conclues :
– Une convention de nantissement d’un compte dépôt à terme par la société (B) au profit de la banque ayant pour objet de garantir le paiement des sommes dues à celle-ci par la société (A) au titre de l’ouverture de crédit ;
– Une convention de délégation de créance par laquelle la société (B), débitrice de la société (A) s’obligeait à payer à la banque les sommes dues à celle-ci au titre de l’ouverture de crédit.
La société (A) ayant ensuite été mise en redressement puis en liquidation judiciaire. La banque a déclaré la créance née du contrat de crédit et réalisé le nantissement.
Faisant valoir que cette sûreté lui était inopposable en l’absence d’autorisation de son conseil d’administration, la société (B), qui est une société anonyme, a assigné la banque en restitution de la somme perçue.
Estimant que M.X président du conseil d’administration et directeur de la société (B) avait engagé sa responsabilité personnelle en signant une convention de nantissement inopérante, la banque l’a appelé en intervention forcée pour obtenir la réparation de son préjudice.
Procédure
Un jugement du Tribunal de commerce de Paris du 27 octobre 2009 a débouté la banque de sa demande.
L’appel de la banque a également été rejetée par la Cour d’appel de Paris dans une décision du 29 octobre 2015.
La banque s’est ensuite pourvu en cassation.
La question posée alors à la Cour de cassation est celle de savoir si M.X avait engagé sa responsabilité personnelle en signant une convention de nantissement inopérante.
La Cour de cassation rejette au même titre que la Cour d’appel les arguments de la banque en jugeant que le dirigeant d’une société anonyme (SA) qui consent une garantie sans l’autorisation préalable du conseil d’administration requise par l’article L. 225-35 du Code de commerce ne commet en principe pas de faute séparable de ses fonctions.
Analyse
Dans cet arrêt du 8 novembre 2017 (pourvoi n°16-10.626), la chambre commerciale de la Cour de cassation rejette le pourvoi et réitère une solution ancienne en en précisant toutefois les limites.
En effet, la responsabilité d’un dirigeant à l’égard des tiers ne peut être retenue que s’il a commis une faute séparable de ses fonctions. Pour la Cour de Cassation une telle faute est caractérisée quand le dirigeant commet intentionnellement une faute d’une particulière gravité, incompatible avec l’exercice normal de ses fonctions sociales.
Or, tel n’était pas le cas en l’espèce puisque la banque ne démontrait pas le caractère délibéré de la faute et n’établissait aucune manœuvre de la part de M.X.