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23/05/2023

Conflit d’intérêts et action sociale ut singuli : la désignation d’un mandataire ad hoc est obligatoire

Cass. com., 9 novembre 2022, n°20-19.077

Une SARL exploite un commerce dans des locaux ayant fait l’objet d’une acquisition par une SCI dont la gérante est également gérante de la SARL.  

L’un des associés de la SARL forme une action sociale ut singuli contre la gérante de la SARL et la SARL. Il reproche à la gérante de la SARL d’avoir gardé le silence quant au projet de cession de l’immeuble d’exploitation et de l’avoir acquis par l’intermédiaire de la SCI au détriment des intérêts de la SARL.

La gérante a opposé une fin de non-recevoir tirée de ce que la SARL n’était pas valablement représentée faute de désignation d’un mandataire ad hoc à l’action sociale.

L’article R. 223-32, alinéa 1er, du Code de commerce prévoit que « lorsque l’action sociale est intentée par un ou plusieurs associés, agissant soit individuellement, soit dans les conditions prévues à l’article R. 223-31, le tribunal ne peut statuer que si la société a été régulièrement mise en cause par l’intermédiaire de ses représentants légaux ».

A la lecture de cet article, les premiers juges et les conseillers de la Cour d’appel de Douai rejettent la fin de non-recevoir en retenant pour cette dernière que « si l’action ut singuli exige, en raison de sa nature sociale, la mise en cause régulière de la société par l’intermédiaire de son représentant légal, l’absence de désignation d’un mandataire ad hoc ne constitue pas une condition de recevabilité de l’action ».   

La Cour de cassation retient une lecture différente dudit article. Selon elle, la désignation d’un mandataire ad hoc ne constitue pas une faculté, mais une obligation. Dès lors, lorsqu’ il existe un conflit d’intérêts entre la société et son représentant légal, la société ne peut être régulièrement représentée que par un mandataire ad hoc, qu’il appartient au juge de désigner à la demande de l’associé ou du représentant légal ou, le cas échéant, d’office.