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01/09/2023

Elargissement de la nullité des délibérations prises en violation des statuts 

Cass. com. 15 mars 2023, n° 21-18.324

Plusieurs sociétés associées d’une SAS demandaient l’annulation de toutes les assemblées générales et décisions collectives de cette dernière depuis la date du 3 avril 2012, estimant qu’elles avaient été privées de leurs droits d’associé depuis cette date. La Cour d’appel accède à sa demande et annule les décisions collectives litigieuses.

La SAS se pourvoit en cassation en avançant pour l’essentiel que la violation des statuts ne pouvait fonder l’annulation des décisions prises par la SAS.

Pour rappel, l’article L. 227-9 du Code de commerce dispose qu’en SAS :

  • les statuts déterminent les décisions qui doivent être prises collectivement par les associés dans les formes et conditions qu’ils prévoient (al. 1) ;
  • certaines décisions relèvent obligatoirement de la compétence de la collectivité des associés, et sont adoptées dans les conditions elles aussi fixées par les statuts (al. 2) ;
  • les décisions prises en violation dudit article peuvent être annulées à la demande de tout intéressé (al. 4).

Le régime de droit commun des nullités, fixé par l’article L. 235-1 du Code de commerce, prévoit que la nullité des actes ou délibérations pris par les organes d’une société commerciale ne peut résulter que de la violation d’une disposition impérative du livre II du même code ou des lois qui régissent les contrats ou d’une stipulation statutaire qui fait usage de la faculté, ouverte par une disposition impérative, d’aménager conventionnellement la règle posée par celle-ci (Com., 18 mai 2010, n° 09-14.855).

Jusqu’à présent, la Cour de cassation admettait que la violation des règles statutaires définissant, en application de l’article L. 227-9, alinéa 1, du Code de commerce, les décisions relevant de la compétence de la collectivité des associés de SAS, ne pouvait être sanctionnée de nullité (Cass. com., 26 avr. 2017, n°14-13.554).

Les décisions pouvant être sanctionnées de nullité en application de l’article L. 227-9, alinéa 4, ne s’appliquait qu’aux dispositions impératives de l’article L. 227-9, c’est-à-dire celles de l’alinéa 2 dudit texte, visant le champ obligatoire des décisions devant être adoptées collectivement par les associés (augmentation de capital, dissolution, transformation…)

En effet, les clauses statutaires qui déterminent les décisions à prendre collectivement par les associés ainsi que les formes et conditions dans lesquelles elles doivent l’être en application de l’article L 227-9, alinéa 1, du Code de commerce, n’aménagent aucune disposition impérative, tirant au contraire parti de la liberté que ce texte laisse aux statuts.

Dans le présent arrêt, la Cour de cassation revient sur cette solution en jugeant pour la première fois qu’une décision de SAS qui ne respecte par le régime des décisions collectives fixé par les statuts pouvait être annulée si la violation est de nature à influer sur le résultat de la consultation. Pour la Cour de cassation, l’article L 227-9, alinéa 4, du Code de commerce doit être lu comme visant les décisions prises en violation de l’ensemble de ces clauses, dont l’alinéa 1 dudit texte.

En pratique, seront donc susceptibles d’être annulées les décisions collectives prises par les associés sans respecter les formes et conditions de leur adoption que les statuts ont déterminées en application de l’article L. 227-9, alinéa 1, du Code de commerce (réunion d’une assemblée physique, participation par visioconférence, règles de quorum et de majorité, formalités de convocation…).