Exclusion des abandons de créances pour le calcul du rapport d’assujettissement à la taxe sur les salaires
Conseil d’Etat, 17/06/2024, n°474155
Le 17 juin 2024, le Conseil d’Etat a rendu un arrêt en matière de taxe sur les salaires dans lequel il a jugé que les abandons de créances dont a bénéficié une société ne doivent pas être pris en compte pour le calcul du rapport d’assujettissement à la taxe sur les salaires.
Pour rappel, la taxe sur les salaires prévue à l’article 231, 1 du Code général des impôts est une contribution assise sur le montant des salaires versés par une entreprise. La particularité de cette taxe est de ne s’appliquer qu’aux employeurs dont moins de 90 % du chiffre d’affaires a été soumis à la TVA au titre de l’année civile précédant celle du paiement des rémunérations. Ce ratio est appelé rapport d’assujettissement à la taxe sur les salaires.
Le texte de l’article 231, 1 du Code ne donne pas de définition précise de la notion de chiffre d’affaires à retenir pour le calcul du rapport d’assujettissement à la taxe sur les salaires. Il précise toutefois que le chiffre d’affaires pris en compte au dénominateur s’entend du total des recettes et autres produits, y compris ceux correspondant à des opérations qui n’entrent pas dans le champ de la TVA. Les services fiscaux ont entendu faire une interprétation large de la notion de « recettes et autres produits », conformément d’ailleurs à leur doctrine publiée au BOFiP (BOI-TPS-TS-20-30 n°165, 30-3-2022).
En l’espèce, une société avait bénéficié d’abandons de créances octroyés par sa société mère pour des montants de 70 millions d’euros en 2012 et 37 millions d’euros en 2013. Or, le chiffre d’affaires soumis à TVA de cette filiale s’élevait à 66 millions d’euros pour 2012 et 52 millions d’euros en 2013.
L’administration estimait que les abandons de créances devaient être pris en compte au dénominateur pour le calcul du rapport d’assujettissement à la taxe sur les salaires et donc que la filiale était redevable de cette taxe. La Cour administrative d’appel de Paris avait donné raison à l’administration.
Le Conseil d’Etat a cassé l’arrêt rendu par la Cour administrative d’appel de Paris en indiquant dans un considérant concis que « les abandons de créance ne constituent pas des recettes ou autres produits devant être inclus dans les chiffres d’affaires retenus pour l’assujettissement à la taxe sur les salaires ».
Les conclusions de la rapporteure publique plaidaient également en faveur de l’exclusion des abandons de créances pour le calcul du rapport d’assujettissement. Selon la rapporteure publique, des produits comptables aussi éloignés de la notion de chiffre d’affaires que des abandons de créances, qui, à l’instar des livraisons à soi-même, ne génèrent pas de flux financier, ne doivent pas être inclus dans le chiffre d’affaires au sens de la taxe sur les salaires.
Nous ne pouvons que saluer l’orthodoxie du Conseil d’Etat dont la décision permettra aux sociétés de continuer à bénéficier d’abandons de créances sans qu’une partie de l’intérêt de cette aide ne soit perdu en raison d’un surcout de taxe sur les salaires.
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