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18/12/2018

#Concurrence & Distribution – Flash EGALim : Publication de l’ordonnance relative au relèvement du SRP et à l’encadrement des promotions

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Présentée mercredi 12 décembre 2018 au Conseil des Ministres, l’ordonnance relative au relèvement du seuil de revente à perte (SRP) et à l’encadrement des promotions a été publiée au Journal Officiel du jour.

L’ordonnance n°2018-1128 du 12 décembre 2018 (l’Ordonnance) comporte un certain nombre de changements à la fois par rapport aux dernières versions du texte qui avaient circulé, et au compte-rendu du Conseil des Ministres du 12 décembre 2018.

Les mesures prévues par l’Ordonnance constituent un dispositif à vocation expérimentale, pour une durée de 2 ans à compter de leur entrée en vigueur.

 

1. LE RELEVEMENT DU SRP (Art. 2 de l’Ordonnance)

 

Produits concernés : les denrées alimentaires et les produits destinés à l’alimentation des animaux de compagnie, revendus en l’état au consommateur.

Mécanisme de relèvement : est affecté d’un coefficient de 1,10 le prix d’achat effectif, défini par l’article L.442-2 du Code de commerce comme le « prix unitaire net figurant sur la facture d’achat, minoré du montant de l’ensemble des autres avantages financiers consentis par le vendeur exprimé en pourcentage du prix unitaire net du produit et majoré des taxes sur le chiffre d’affaires, des taxes spécifiques afférentes à cette revente et du prix du transport » (c’est-à-dire le prix 3x net, augmenté des taxes sur le chiffre d’affaires et du prix du transport).

Le coefficient 0,9 dont le grossiste peut affecter son prix d’achat effectif, n’est pas impacté par les dispositions de l’Ordonnance.

Date d’entrée en vigueur : «  à une date fixée par décret et au plus tard le 1er juin 2019 ».
Le relèvement du SRP entrera en vigueur au plus tard le 1er juin prochain, à moins qu’un décret publié au Journal Officiel avant cette date butoir, ne prévoit une entrée en vigueur à une date plus proche.
La date du 1er février 2019 figure dans le compte rendu du Conseil des Ministres du 12 décembre dernier, comme la date qui serait fixée par le décret à venir pour l’entrée en vigueur des dispositions relatives au relèvement du SRP.

 

2. L’ENCADREMENT DES PROMOTIONS (Art. 3 de l’Ordonnance)

 

Promotions concernées : tous les « avantages promotionnels, immédiats ou différés, ayant pour effet de réduire le prix de vente au consommateur de denrées alimentaires ou de produits destinés à l’alimentation des animaux de compagnie ». Le Rapport au Président de la République relatif à l’Ordonnance, précise que cet encadrement est applicable par dérogation au plafonnement des Nouveaux Instrument Promotionnels (NIP) pour les produits agricoles mentionnés à l’article L. 441-2-1, le lait et les produits laitiers, fixé à 30% de la valeur du barème des prix unitaire, frais de gestion compris. Ainsi, selon le Rapport au Président de la République, le plafonnement des NIP pour certains produits agricoles, le lait et les produits laitiers, sera inapplicable pendant les deux ans d’application de l’Ordonnance.

Cette dérogation n’est toutefois plus explicitement visée par l’Ordonnance elle-même.Il convient également de rappeler que depuis le 1er novembre 2018, est interdit l’emploi du terme « gratuit » comme outil marketing et promotionnel de vente d’un produit alimentaire (art. L.441-2 al. 2 du Code de commerce).

Encadrement en valeur : plafonnement des avantages promotionnels, le cas échéant cumulés, accordés au consommateur pour un produit déterminé, à 34% du prix de vente au consommateur ou à une augmentation de la quantité vendue équivalente.

Se référant aux conclusions de l’atelier 7 des Etats généraux de l’Alimentation, le Rapport au Président de la République rappelle qu’un tel taux (34%) « permettrait de continuer à pratiquer des promotions du type « 2 produits achetés, 1 offert » ».Cet encadrement en valeur des promotions entre en vigueur dès le 1er janvier 2019. Le Rapport au Président de la République précise que la date du 1er janvier 2019 a été fixée notamment en vue de permettre la réalisation des campagnes promotionnelles déjà organisées, en particulier celles prévues pour les fêtes de fin d’année.

Encadrement en volume : les avantages promotionnels, accordés par le fournisseur ou par le distributeur, portent sur des produits ne représentant pas plus de 25% :

  • du chiffre d’affaires prévisionnel fixé par la convention commerciale visé à l’article L.441-7 du Code de commerce, applicable aux marques nationales et à certains produits MDD (produits vendus sous marque de distributeur) ;
  • du volume prévisionnel fixé par les contrats de MDD qui répondent aux besoins particulier de l’acheteur ;
  • des engagements de volume portant sur des produits agricoles périssables ou issus de cycles courts de production, d’animaux vifs, de carcasses ou pour les produits de la pêche et de l’aquaculture.

Le texte de l’Ordonnance impose que les conventions L.441-7 du Code de commerce et les contrats MDD « fixent respectivement un chiffre d’affaires prévisionnel et un volume prévisionnel ». Les modalités de détermination de ces chiffres d’affaires et volume prévisionnel, ne sont toutefois pas prévues par l’Ordonnance.

Cet encadrement en volume sera applicable à tous les contrats régissant la relation commerciale pour l’année 2019, y compris pour les contrats conclus avant la date d’entrée en vigueur de l’Ordonnance.

Les produits alimentaires périssables menacés d’une altération rapide sont exclus du dispositif, à condition que l’avantage promotionnel accordé sur ces produits ne fasse l’objet d’aucune publicité ou annonce à l’extérieur du point de vente

 

3. LA POSSIBILITE DE SUSPENDRE L’APPLICATION DU TEXTE EN RAISON DU COMPORTEMENT DES ACHETEURS (Art. 5 de l’Ordonnance)

 

L’article 5 de l’Ordonnance prévoit la possibilité de suspendre l’application de tout ou partie de ses dispositions relatives au relèvement du SRP et à l’encadrement des promotions.

Ainsi, dans l’hypothèse où « le comportement d’un nombre significatif d’acheteurs » de denrées alimentaires et de produits de petfood, lors de la négociation ou de l’exécution des accords commerciaux, serait de nature à « compromettre sensiblement » l’atteinte de l’un des objectifs de rééquilibrage des négociations, des filières, de développement des produits dont la rentabilité est trop faible, un décret pris en Conseil d’Etat, après avis de l’Autorité de la Concurrence pourra suspendre l’application des dispositions de l’Ordonnance en tout ou partie.

Alors que l’un des objectifs de la loi EGAlim est de rééquilibrer les négociations en faveur des fournisseurs, il paraît surprenant que la suspension de l’Ordonnance dépende du seul comportement des acheteurs – distributeurs.

Il convient enfin de rappeler que pour acquérir valeur législative, l’Ordonnance doit être ratifiée par le Parlement (Assemblée Nationale et Sénat) et qu’à l’occasion des débats parlementaires, le texte de l’Ordonnance pourra être modifié.

 

4. L’AVIS DE L’AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

 

En parallèle de la publication de l’Ordonnance, l’Autorité de la Concurrence (AdlC) a rendu public, ce jour,son avis du 23 novembre dernier relatif au dispositif prévu par l’Ordonnance.

Aux termes de cet avis, l’AdlC paraît très réservée sur les mesures prévues par l’Ordonnance :

  • concernant le relèvement du SRP, l’AdlC considère que cette mesure pourrait d’une part dégrader la situation économique des fournisseurs, et d’autre part générer de l’inflation au détriment des consommateurs ;
  • concernant l’encadrement des promotions, l’AdlC considère que l’encadrement en valeur et en volume pourrait conduire à une limitation de la concurrence entre fournisseurs et distributeurs et entraîner une hausse des prix de vente au consommateur.

Au plan pratique, l’Ordonnance soulève encore de nombreuses questions, et ce alors même que l’encadrement des promotions en valeur entrera en vigueur dans quelques jours.

Se posent notamment les questions de délimitation des opérations promotionnelles entrant dans le champ d’application du texte (quid des programmes de fidélisation des distributeurs), de détermination du prix de référence pour le calcul des 34%, des modalité de détermination du chiffre d’affaires prévisionnel…

Une circulaire d’interprétation est annoncée par l’administration.

Dans cette attente, les rendez-vous de négociations à venir devront tenir compte des différentes interprétations possibles de l’Ordonnance.