#JUIN 2018 – DROIT IMMOBILIER
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Notion de fonds de commerce ouvrant droit au statut des baux commerciaux
Cass. 3ème civ. 5 avril 2018 n°17/10466
L’activité de location de bateaux sur le bassin du Jardin du Luxembourg ne constitue pas un fonds de commerce, faute de clientèle propre. Les critères retenus par la Cour de Cassation sont d’une part celui de la soumission au règlement intérieur du jardin de sorte que l’exploitant ne pouvait exercer son activité que pendant les horaires d’ouverture, et d’autre part, que ses clients ne sont pas fidélisés en ce sens qu’il bénéficiait exclusivement de l’attractivité du jardin. Ces deux critères sont contestables car transposables, par exemple, à une boutique située dans un centre commercial. Le dernier critère, qui semble donc le plus pertinent, est celui de l’encadrement des prix de location des bateaux par le Sénat.
Cette décision rappelle que la qualification de fonds de commerce est toujours étudiée strictement par les tribunaux et, partant, le statut d’application du bail commercial, n’est pas toujours acquis.
L’activité de friterie n’est pas – forcément – complémentaire avec celle de « fast food »
CA Paris 28 février 2018 n°16/13779
Dans une décision qui peut sembler stricte, la Cour d’Appel de Paris considère que l’activité de friterie est connexe ou complémentaire à celle de fast food et refuse ainsi au Preneur la possibilité d’étendre son activité sur le fondement de l’article L.145-47 du code de commerce. En réalité le bail prévoyait une clause précise interdisant expressément l’activité de friterie et/ ou créant des nuisances olfactives. Il est étonnant toutefois que la Cour se soit prononcée sur le caractère connexe/complémentaire alors que le fondement du refus de cette extension était manifestement purement contractuel. Un autre apport de cette décision réside dans la définition de l’activité de « fast-food » puisque la Cour la cantonne à la restauration qui ne nécessite aucune préparation culinaire. Il y a donc lieu de veiller à la rédaction des clauses de destination.
Réajustement conventionnel du loyer en cours de bail et application du mécanisme de déplafonnement
Cass. 3ème civ, 15 février 2018 n°17-11.866
Conventionnellement, un bailleur et son Preneur ont décidé de mettre fin à une procédure de révision du loyer en réajustant le prix du contrat à un certain montant, différent de la valeur locative. Cette décision entraînait, selon le Bailleur un déplafonnement du loyer.
Le preneur a tenté de faire valoir que, ne constitue pas une modification notable des obligations des parties justifiant le déplafonnement des loyers, la fixation consensuelle du loyer.
La Cour de Cassation n’a pas fait droit à cette analyse, estimant que la modification conventionnelle du loyer emporte renonciation au jeu de l’article L145-39 du Code de commerce et entraîne, en conséquence, le déplafonnement du loyer.
Avis du 8 mars 2018 : La cour de Cassation précise les modalités du lissage des loyers commerciaux en cas de déplafonnement
Cass. 3ème civ, 9 mars 2018 n°17-70.040
Le lissage de l’augmentation du loyer déplafonné prévu à l’article L 145-34 du Code de commerce s’opère chaque année par une majoration non modulable de 10 % du loyer de l’année précédente. Dans un avis rendu le 8 mars 2018, la Cour de Cassation précise les modalités d’application de ce mécanisme et indique notamment qu’il appartient aux parties de fixer l’échéancier de cette augmentation progressive de loyer, et non au juge des loyers commerciaux. La cour précise également que cette majoration de 10% n’est pas modulable et ne peut donc être inférieure. La Haute Juridiction rappelle enfin que l’article L145-34 du Code de Commerce n’est pas d’ordre public ; les parties pouvant y déroger conventionnellement.
Responsabilité décennale du fournisseur de matériaux (non qualifié d’EPERS), dont les conseils s’apparentent à ceux d’un maître d’œuvre
Cass. 3ème civ, 28 février 2018 n°17-15.962
Un maître de l’ouvrage a commandé du béton à un fabriquant de matériaux qui, compte tenu de la haute-technicité du matériau, a donné au poseur des instructions techniques précises.
Constatant des défauts affectant le dallage réalisé, le maître de l’ouvrage a assigné en responsabilité le fournisseur du béton, lequel a appelé en garantie le poseur.
Par cet arrêt, la Cour de cassation a déterminé de manière plus précise le régime de responsabilité applicable au fournisseur de matériaux qui ne sont pas qualifiés d’EPERS (défini par les 4 caractéristiques repris dans la circulaire du 21/01/1981).
Le fournisseur de matériaux qui donne des instructions techniques précises au poseur, participe activement à la construction. Il est donc, selon la Cour de cassation, tenu du désordre qui lui est imputable sur le fondement de la garantie décennale.
Sanction de travaux irréguliers en parties communes d’une copropriété
Cass. 3ème civ. 15 février 2018, n°16-17.759
Un copropriétaire a entrepris des travaux de remplacement d’un conduit vétuste, sans autorisation de l’assemblée générale des copropriétaires. La copropriété l’a assigné en demandant la remise en état compte tenu de l’absence d’autorisation préalable.
Le copropriétaire a alors invoqué le caractère dangereux du conduit existant, l’urgence des travaux, et le caractère disproportionné de la demande des plaignants.
Le juge des référés, puis la Cour d’appel et la Cour de cassation, ont toutefois donné raison au syndicat des copropriétaires : les travaux irréguliers constituent un trouble manifestement illicite, et il convient de prescrire les mesures de remise en état qui s’imposent. Le copropriétaire ne pouvait invoquer l’urgence et la nécessité des travaux, en outre, le juge des référés ne peut se substituer ou anticiper une éventuelle décision de l’assemblée générale qui seule peut ratifier les travaux illicites.