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10/10/2024

Le pacte de préférence non assorti d’un terme : un engagement perpétuel valide, auquel chaque contractant peut mettre fin à tout moment

Dans un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 25 septembre 2024 (n°23-14.777) en matière de pacte de préférence, la Haute Juridiction s’est prononcée sur la validité d’un pacte de préférence non assorti d’un terme.

Les faits de cet arrêt sont les suivants : un pacte de préférence portant sur un bien immobilier a été consenti le 19 juillet 1990, sans être assorti d’un terme.

Ce n’est que 21 ans plus tard que le promettant a adressé un courrier invitant les bénéficiaires à prendre position sur l’achat du bien immobilier dans un délai de 3 mois. Les bénéficiaires ont levé l’option indiquant exercer leur droit de préférence.

Le légataire universel du promettant a refusé que le promettant signe l’acte de vente. Le promettant étant décédé, les bénéficiaires ont assigné le légataire universel en vente judiciaire et forcée du bien.

Le légataire universel a contesté l’application du pacte de préférence en raison de l’absence de terme stipulé dans ledit pacte, constituant pour lui un engagement perpétuel devant être sanctionné par la nullité.

La Cour de cassation ne suit pas l’argumentation du légataire universel : les engagements perpétuels ne sont pas sanctionnés par la nullité du contrat mais chaque contractant peut y mettre fin à tout moment, sous réserve de respecter le délai de préavis contractuellement prévu ou, à défaut, un délai raisonnable. Le pacte de préférence est ainsi assimilé à un contrat à durée indéterminée.

En l’espèce, le pacte de préférence était donc valide et la levée d’option ayant été faite dans le délai stipulé par le promettant, le contrat était donc parfaitement formé.

Avant l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016[1], la prohibition des engagements perpétuels était déduite des différents textes spéciaux tels que la durée maximale d’une société (99 ans[2]) ou l’interdiction du mandat perpétuel[3]. Dorénavant, l’interdiction des engagements perpétuels est codifiée à l’article 1210 du Code civil :

« Les engagements perpétuels sont prohibés.

Chaque contractant peut y mettre fin dans les conditions prévues pour le contrat à durée indéterminée ».

La nullité est donc écartée et implique qu’un contrat non assorti d’un terme doit être considéré comme en contrat à durée indéterminée, résiliable à tout moment, le cas échéant moyennant un préavis contractuellement prévu.

Ainsi, bien que la solution adoptée par la Cour dans son arrêt du 25 septembre 2024 ait été prise sous l’empire des textes antérieurs à l’ordonnance du 10 février 2016, celle-ci devrait manifestement s’appliquer pour les engagements conclus postérieurement à cette réforme.


[1] Portant réforme du droit des contrat, du régime général et de la preuve des obligations.

[2] C. civ., art. 1838.

[3] C. civ., art. 2003.


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