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13/02/2023

Le « Procès des Metabirkins » opposant Hermès à Mason Rothschild

Le 8 février 2023, le tribunal fédéral de Manhattan a rendu sa décision dans le « procès des Metabirkins » et a condamné l’artiste digital à verser 133 000 dollars de dommages et intérêts à Hermès en raison de contrefaçon, dilution de marque et cybersquatting.

L’artiste américain digital Mason Rothschild a créé et commercialisé « Metabirkins », une série de 100 NFT déclinant le sac Birkin d’Hermès avec de la fausse fourrure. Cette collection avait été lancée lors des célébrations du Miami Art Basel 2021 et avait rapporté à l’artiste 1,1 millions de dollars. Consécutivement à cela, Hermès avait sollicité la cession des ventes dans le métaverse sur la plateforme OpenSea, considérant notamment que les Metabirkins venaient porter atteinte à son image de marque et créer un risque de confusion en induisant les consommateurs en erreur.  

Une procédure judiciaire devant le tribunal fédéral de New York avait été ensuite ouverte le 14 janvier 2022 sur le fondement de la contrefaçon du modèle Birkin et de la marque correspondante, M.Rothschild refusant de cesser de vendre sa collection NFT. En défense, l’artiste invoquait deux éléments :  

  • La protection de sa liberté d’expression par le premier Amendement de la Constitution américaine  
  • Le test « Rogers vs Grimaldi », issu de la jurisprudence du même nom (US, Court of Appeals for the Second Circuit, 5 mai 1989) aux termes de laquelle chacun est libre d’exploiter une marque protégée sans autorisation dès lors que cette exploitation constitue une expression artistique et n’induit pas explicitement les consommateurs en erreur.  

Le procès des Metabirkins a finalement débuté le 30 janvier 2023 devant le tribunal fédéral de Manhattan qui a rendu sa décision le 8 février. Il a ainsi été retenu par le jury composé de 9 membres que : 

D’une part : Les Metabirkins ne relèvent pas du premier Amendement de la Constitution

En effet, M.Rotschild soutenait que, comme il avait lancé le projet principalement pour des raisons artistiques, les NFT était des œuvres d’art. Pour autant selon Hermès, toute expression artistique était au mieux accessoire en ce que l’intention réelle de M.Rotschild était de confondre les clients potentiels en leur faisant croire que les Metabirkins étaient associés à Hermès. Le tribunal a tranché et a indiqué qu’il s’agissait là de produits de consommation et non d’œuvres d’art protégées au nom dudit Amendement. 

D’autre part : Les Metabirkins étaient susceptibles de semer la confusion chez les consommateurs

Pour établir ce point, les juges ont dû se baser sur un faisceau d’indices, tels : 

  • La force de la marque « Birkin »  
  • Le degré de similitude entre la marque Birkin d’Hermès et le nom et l’apparence des NFT Metabirkins 
  • La similitude de la clientèle visée par Hermès et par les Metabirkins  
  • Le risque de confusion entre les produits d’Hermès et les Metabirkins aux yeux des consommateurs  
  • L’intention de mauvaise foi de faire croire aux consommateurs qu’Hermès était à l’origine des Metabirkins ou du moins les approuvait 
  • La probabilité qu’Hermès ait des projets concrets et réalistes pour produire et vendre ses propres NFT utilisant la marque Birkin 

Par conséquent, Mason Rothschild a été condamné à verser 110 000 dollars de dommages et intérêts pour contrefaçon et dilution de marque.  

De plus, Mason Rothschild a été condamné à verser 23 000 euros de dommages et intérêts pour cybersquatting en raison de l’utilisation du nom de domaine « https://metabirkins.com » qui pouvait laisser penser qu’il s’agissait d’un site web appartenant à Hermès.  

Cette décision était très attendue car il s’agit de la toute première décision relative aux NFT. Elle marque un tournant majeur dans la législation du Web3 et plus particulièrement dans l’encadrement des univers virtuels.

Source: Hermes International v. Rothschild, 1:22-cv-00384 – CourtListener.com