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01/06/2022

Prohibition de l’alcool dans l’entreprise, une mesure justifiée et proportionnée ?

Conseil d’État, 1ère – 4ème chambres réunies, 14/03/2022, n°434343

Dans cet arrêt, un employeur d’un établissement de la société Renault a introduit dans son règlement intérieur une clause interdisant l’introduction ou la consommation de boissons alcoolisées. L’administration lui demande de modifier cette clause, ce que l’employeur refuse.

L’employeur a donc tenté de faire annuler cette décision pour excès de pouvoir devant le Tribunal administratif et la Cour administrative d’appel mais aucune n’a accédé à la requête de l’employeur.

Les juges du fond ont en effet retenu que l’employeur ne justifiait pas de la proportionnalité de cette mesure par rapport aux risques, ne démontrant pas l’existence d’une situation particulière de danger faute d’éléments sur le nombre d’accidents du travail ou de sanctions préalables liées à la consommation d’alcool sur le site.

Le Conseil d’Etat censure le raisonnement de la Cour administrative d’appel en rappelant :

–  au visa de l’article L. 1121-1 du code du travail, que l’employeur en s’appuyant sur son obligation de prévention des risques professionnels peut limiter – voire interdire – la consommation d’alcool sur le lieu de travail à condition que cette restriction soit justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché.

– au visa de l’article R. 4228-20 alinéa 2 du code du travail, que lorsque la consommation de boissons alcoolisées (…) est susceptible de porter atteinte à la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs, l’employeur prévoit ou peut prévoir, dans le règlement intérieur (…) les mesures permettant de protéger la santé et la sécurité des travailleurs et de prévenir tout risque d’accident. Ces mesures, qui peuvent notamment prendre la forme d’une limitation voire d’une interdiction de cette consommation, doivent être proportionnées au but recherché.

Il considère ainsi en l’espèce que, compte tenu de la manipulation de produits chimiques par 75% des salariés et le déplacement de ces derniers sur l’ensemble du site, la mesure est justifiée par la nature des tâches à accomplir et proportionnée au but recherché.

Le Conseil d’Etat précise par ailleurs que l’employeur n’a pas à faire état de risques déjà avérés dans la mesure où la clause de tolérance zéro alcool est justifiée par son obligation de prévention et donc de survenance du risque.