Reprise des actes pour une société en cours de formation
Cour de Cassation, chambre commerciale, 29 novembre 2023, n° 22-18.295
La Cour de Cassation est venue alléger les exigences de formalisme des actes passés « au nom » et « pour le compte » d’une société en formation, en laissant au juge la libre appréciation des conditions entourant la conclusion d’un acte.
Les sociétés commerciales jouissent de la personnalité morale à dater de leur immatriculation au registre du commerce et des sociétés. Avant l’immatriculation, il arrive que les associés nécessitent de passer certains actes pour initier le lancement de l’activité. Dans ce cas, il est d’usage que les actes passés soient prix « au nom » et « pour le compte » de la société en formation.
Les personnes qui ont agi « au nom » et « pour le compte » d’une société en formation avant qu’elle ait acquis la jouissance de la personnalité morale sont tenues solidairement et indéfiniment responsables des actes ainsi accomplis, à moins que la société, après avoir été régulièrement constituée et immatriculée, ne reprenne les engagements souscrits. Ces engagements sont alors réputés avoir été souscrits dès l’origine par la société.
Depuis de nombreuses années, la jurisprudence constante de la Cour de Cassation est venue apporter le principe selon lequel ne sont susceptibles d’être repris par la société après son immatriculation que les engagements expressément souscrits « au nom » et « pour le compte» de la société en formation, et que sont nuls les actes passés « par » la société avant que celle-ci ne jouisse de la personnalité morale, même s’il ressort des mentions de l’acte ou des circonstances que l’intention des parties était que l’acte soit accompli au nom et pour le compte de la société.
Par un arrêt du 29 novembre 2023, la Cour de Cassation a procédé à un revirement de jurisprudence en retenant que l’exigence selon laquelle l’acte doit, expressément et à peine de nullité, mentionner qu’il est passé « au nom » ou « pour le compte » de la société en formation, ne résulte pas explicitement des textes régissant le sort des actes passés au cours de la période de formation.
Il apparaît dès lors possible, et souhaitable, de reconnaître désormais au juge le pouvoir d’apprécier souverainement, par un examen de l’ensemble des circonstances, tant intrinsèques à l’acte qu’extrinsèques, si la commune intention des parties n’était pas que l’acte fût conclu au nom ou pour le compte de la société en formation et que cette société puisse ensuite, après avoir acquis la personnalité juridique, décider de reprendre les engagements souscrits.
L’exigence de forme a donc été allégé, même si, dès lors qu’un acte est passé pour le compte d’une société en formation, il semble toujours judicieux de le mentionner clairement dans l’acte.
Découvrez toutes les actualités du département Droit des Sociétés, Fusions & Acquisitions en cliquant sur ce lien