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20/10/2022

Une société peut être engagée par son salarié à son insu

Cass. com. 9-3-2022 n° 19-25.704 F-D, Sté Cofimo c/ Sté Océanis promotion

Une société de promotion immobilière a signé une promesse unilatérale de vente portant sur plusieurs parcelles de terrain en vue de la construction de logements. Une autre société, une SARL, est intervenue dans cette opération en qualité d’apporteur d’affaires. Pour éviter le recours d’un riverain contre le permis de construire qu’il a obtenu, le promoteur conclut un protocole d’accord prévoyant le versement d’une indemnité transactionnelle de 60 000 €. Le salarié de la SARL accepte que son employeur prenne en charge une partie de l’indemnité en rétrocédant 30 000 € de ses honoraires.

La SARL refuse de verser au promoteur l’indemnité promise par son salarié conduisant le promoteur à l’assigner en paiement.

La Cour d’appel fait droit à cette demande en application de la théorie du mandat apparent.

Une personne peut être engagée sur le fondement d’un mandat apparent lorsque la croyance du tiers aux pouvoirs du prétendu mandataire a été légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisent ce tiers à ne pas vérifier lesdits pouvoirs.

La SARL conteste la position de la Cour d’appel en avançant deux arguments :

  • la nomination et la cessation des fonctions du gérant sont soumises à des règles de publicité qui tiennent en échec la théorie du mandat apparent ;
  • la théorie du mandat apparent nécessite que les circonstances autorisent le cocontractant à ne pas vérifier les limites exactes du pouvoir du prétendu représentant, et ces circonstances ne seraient pas présentes en l’espèce.

La Cour de cassation rejette ces arguments et considère au contraire que :

  • le seul fait que la nomination et la cessation des fonctions de gérant de SARL soient soumises à des règles de publicité légale ne suffit pas à exclure qu’une telle société puisse être engagée sur le fondement d’un simple mandat apparent de l’un de ses salariés ;

les circonstances de l’espèce autorisaient bien le défendeur à ne pas vérifier la réalité des pouvoirs du salarié. En effet, (i) le salarié de la SARL était le seul interlocuteur du promoteur s’agissant de la rémunération de la SARL, (ii) le salarié avait déclaré dans trois courriels intervenir pour le compte de la SARL, (iii) le promoteur envoyait ses propres courriels à l’adresse de la SARL et non à l’adresse mail personnelle du salarié.