Travailleur handicapé : attention à prendre des mesures d’aménagement concrètes et appropriée
Travailleur handicapé aménagement
(Cass. soc., 15 mai 2024, n°22-11.6)
La présence de travailleurs handicapés dans l’entreprise crée des obligations particulières pour l’employeur, souvent méconnues. L’employeur doit notamment, en vertu de l’article L. 5213-6 du code du travail, prendre « en fonction des besoins dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux travailleurs handicapés d’accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l’exercer ou d’y progresser ou pour qu’une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée. Ces mesures sont prises sous réserve que les charges consécutives à leur mise en œuvre ne soient pas disproportionnées, compte tenu de l’aide prévue à l’article L. 5213-10 qui peut compenser en tout ou partie les dépenses supportées à ce titre par l’employeur. Le refus de prendre des mesures (…) peut être constitutif d’une discrimination (…) ».
Dans un arrêt de la Cour de cassation, la chambre sociale est venue préciser les conditions à réunir pour considérer qu’un manquement de l’employeur soit considéré comme discriminatoire.
En l’espèce, une salariée, agent de nettoyage, reconnue travailleur handicapé, a été déclarée inapte à la suite d’un accident du travail. L’avis d’inaptitude émis par le médecin du travail indiquait : « inapte au poste, apte à un autre (…) A la suite du premier examen du 25/08/2015, Mme [H] est inapte au poste d’agent de service. Elle pourrait occuper un poste à temps partiel en télétravail, sans sollicitation du membre supérieur droit, sans station debout, sans marche, sans travail en antéflexion du tronc, sans travail à genou ou accroupi, sans port de charge ».
Licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement, la salariée a saisi le conseil de prud’hommes en nullité de son licenciement, estimant avoir été victime d’une discrimination en raison du refus de l’employeur de prendre des mesures.
La cour d’appel juge son licenciement nul comme constitutif d’une discrimination en raison du handicap pour non-respect de l’obligation prévue à l’article L. 5213-6 du code du travail au motif que l’employeur n’a pas pris en compte le statut de travailleur handicapé de la salariée et ne lui a proposé aucune mesure particulière dans le cadre de la recherche de reclassement.
Au visa de l’article L. 1134-1 du code du travail, la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel et précise que le juge, saisi d’une action au titre de la discrimination en raison du handicap, doit :
– d’abord, rechercher si le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une telle discrimination, tels que le refus, même implicite, de l’employeur de prendre des mesures concrètes et appropriées d’aménagements raisonnables, le cas échéant sollicitées par le salarié ou préconisées par le médecin du travail ou le comité social et économique en application des dispositions des articles L. 1226-10 et L. 2312-9 du code du travail, ou son refus d’accéder à la demande du salarié de saisir un organisme d’aide à l’emploi des travailleurs handicapés pour la recherche de telles mesures ;
– ensuite, rechercher si l’employeur démontre que son refus de prendre ces mesures est justifié par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination en raison du handicap, tenant à l’impossibilité matérielle de prendre les mesures sollicitées ou préconisées ou au caractère disproportionné pour l’entreprise des charges consécutives à leur mise en œuvre
Ce n’est que si ces deux conditions sont réunies que les juges pourront considérer que la discrimination en raison du handicap peut être retenue et dans ce cas, prononcer la nullité du licenciement.
Travailleur handicapé aménagement