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04/07/2025

Arrêt “Taxe Lidl” : quel impact pour les négociations 2026 ?

Caroline Cazaux, avocate associée, décrypte la décision rendu par la Cour de cassation le 25 juin 2025 et ses conséquences pour les négociations 2026.

Par arrêt en date du** 25 juin 2025** la Cour de cassation a jugé que les réductions de prix ne peuvent pas être examinées sous l’angle de l’obtention ou la tentative d’obtention d’un avantage ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné par rapport à la valeur du service rendu (art. L.442-6 1° du Code de commerce dans sa version alors en vigueur).

Contexte et rappel des faits

Entre 2013 et 2015, le Galec (centrale d’achats du groupement E.Leclerc) avait exigé des fournisseurs également référencés chez Lidl, une réduction de prix inconditionnelle et additionnelle de 10%, remise dite « Taxe Lidl ».Estimant que cette réduction était dénuée de contrepartie, le Ministre de l’Economie et des Finances avait assigné le Galec en nullité des clauses relatives à cette « Taxe Lidl ».

Débouté en 1ère instance comme en appel, le Ministre de l’Economie et des Finances s’est pourvu devant la Cour de cassation.

La décision du 25 juin 2025

Le 25 juin dernier, la Haute juridiction rejette le pourvoi du Ministre estimant que :

« seul l’avantage ne relevant pas des obligations d’achat et de vente consenti par le fournisseur au distributeur doit avoir pour contrepartie un service commercial effectivement rendu ».

Selon la Cour de cassation, la Cour d’Appel en a exactement déduit que la Taxe Lidl ne constitue pas un avantage devant avoir pour contrepartie un service commercial, et n’entre donc pas dans le champ de la prohibition de l’article L.442-6 1° du Code de commerce dans sa version alors en vigueur. ** Autrement dit sur la base du texte alors en vigueur, seuls les services de coopération commerciale et les services distincts entrent dans le champ de la prohibition de l’obtention d’un avantage ne correspondant à aucun service commercial rendu, ou manifestement disproportionné. **

Cet arrêt marque une rupture avec la jurisprudence de la même Chambre commerciale de la Cour de cassation, qui considérait que l’application de cette même prohibition exigeait «* seulement* » :

  • la constatation de l’obtention d’un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu,

  • « quelle que soit la nature de cet avantage ».

En 2023, la Cour de cassation n’avait pas retenu une interprétation aussi littérale du texte alors en vigueur que celle adoptée dans l’affaire Taxe Lidl.

Conséquences pour les négociations 2026 ?

Au-delà de cette évolution de la jurisprudence de la Cour de cassation, la solution de l’arrêt Taxe Lidl aura-t-elle un impact sur les négociations commerciales 2026 ?

Rien n’est moins sûr !

Tout d’abord, la disposition analysée par la Cour de cassation n’est plus en vigueur en des termes identiques.

En effet, l’article L.442-6 1° du Code de commerce alors en vigueur prévoyait que l’avantage prohibé était celui qui ne correspondait « à aucun service commercial effectivement rendu ».

Anticipant que cette rédaction pouvait être appliquée de manière restrictive, le Rapport au Président relatif à l’Ordonnance n°2019-359 du 24 avril 2019 préconise une modification du texte alors en vigueur, pour les raisons suivantes :

«* l'actuelle rédaction peut être interprétée comme limitant le champ d'application de cette pratique aux accords de coopération commerciale du fait de la référence au « service commercial ». Or, les juridictions appliquent ce texte dans les relations commerciales en examinant à juste titre les contreparties aux avantages obtenus sans se limiter aux opérations de coopérations commerciales. La suppression des termes : « service commercial effectivement rendu » est donc pertinente. *»

Ainsi, depuis la réforme de 2019, l’article L.442-1 du Code de commerce prohibe l’obtention ou la tentative d’obtention d’un « *avantage ne correspondant à aucune contrepartie ou manifestement disproportionné au regard de la valeur de la contrepartie consentie *».

Les réductions de prix entrent donc depuis lors, dans le champ d’application du texte.

Par ailleurs, il convient de rappeler que depuis 2021, la part de la MPA dans les produits alimentaires entrant dans le champ d’EGALIM, est non-négociable.

Si l’arrêt Taxe Lidl fait actuellement l’objet de nombreux commentaires, sa portée, dans le cadre de négociations 2026 à venir, parait limitée.

Les textes encadrant les négociations commerciales ont évolué :

  • la nouvelle rédaction de l’article L.442-1 du Code de commerce prohibe l’obtention d’avantages « sans contrepartie », incluant les réductions de prix ;

  • la part de la MPA dans les produits soumis à EGALIM est non-négociable.


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(1) (Cass. Com.11 janvier 2023, n°21-11.163)