Cass. 3e civ., 23 janv. 2025, n° 23-14.887, n° 41 FS-B : dans un arrêt publié au Bulletin civil, la Cour de cassation est venue reconnaitre, de manière inédite, que l’obligation pour le bailleur de souscrire une assurance de responsabilité civile de copropriétaire non-occupant pouvait fonder le déplafonnement du loyer en renouvellement d’un bail commercial.

Les faits en l’espèce concernaient une preneuse à bail commercial de locaux situés dans un immeuble soumis au statut de la copropriété ayant sollicité, par actes extrajudiciaires des 9 et 10 décembre 2015, le renouvellement de son bail venant à expiration le 30 décembre 2015.
Si les bailleurs avaient accepté le principe du renouvellement, ces derniers ont toutefois, sollicité la fixation du loyer du bail renouvelé à un prix déplafonné et, après notification d’un mémoire, assigné la locataire devant le juge des loyers commerciaux.
La cour d’appel de Pau ayant eu à traiter du litige a fait droit à la demande de déplafonnement des bailleurs, estimant pour ce faire qu’il devait être tenu compte de la charge légale nouvelle, tenant à l’obligation de souscrire une assurance de responsabilité civile du copropriétaire non-occupant s’imposant depuis la loi ALUR du 24 mars 2014, pour la fixation du bail renouvelé en 2015, peu important que cette assurance ait été volontairement souscrite auparavant.
S’étant pourvue en cassation, la preneuse soutenait que cette charge ne devait pas être prise en compte dans la mesure où la prime d’assurance était payée par les bailleurs avant même que cette dernière ne devienne obligatoire, si bien que son augmentation ne résultait pas d’une obligation prévue par la loi mais des rapports entre les propriétaires et leur assureur.
La preneuse se prévalait donc de l’origine contractuelle et non légale, du contrat d’assurance pendant une partie du bail initial, afin d’exclure la prise en compte de son coût dans le calcul du loyer du bail renouvelé.
Sur le fondement des articles L.145-34 alinéa 1er, L.145-33, 3° et R.145-8 du code de commerce, les juges de la Cour cassation ont rejeté le pourvoi de la preneuse en retenant qu’il devait être tenu compte de la charge légale nouvelle dans la fixation du montant du loyer du bail commercial renouvelé et que tel était le cas de l’obligation du bailleur de s’assurer contre les risques de responsabilité civile dont il doit répondre en sa qualité de copropriétaire non occupant.
Si la solution ne surprend pas, l’arrêt laisse néanmoins comprendre que la seule obligation de souscription d’une assurance responsabilité civile obligatoire pesant sur les bailleurs ne peut suffire à elle seule à caractériser la modification notable des obligations des parties.
En effet, pour la Cour de cassation, cette modification notable se caractérisait, en l’espèce, par une baisse significative du revenu locatif au cours du bail expiré qui s’élevait, toutes obligations légales cumulées, à 27,97 %.
Cet arrêt ne devrait donc pas initier un mouvement généralisé de déplafonnement du montant des loyers en matière de renouvellement de baux commerciaux, l’obligation pour un copropriétaire non occupant de souscrire une assurance responsabilité civile ne pouvant, selon toute vraisemblance, justifier à elle seule de cette baisse significative du revenu locatif et donc du déplafonnement.
Ainsi, avant de solliciter le déplafonnement du loyer d’un bail renouvelé, il conviendra pour les bailleurs de s’assurer de l’impact global des nouvelles normes à sa charge depuis la dernière fixation du loyer.
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