Le 17 avril dernier, le député Éric Coquerel (LFI) a déposé une proposition de loi visant à lutter contre les dérives de la multipropriété dans le football professionnel.
Soutenu par près de quatre-vingt-dix parlementaires issus de tous bords politiques, le texte entend interdire à une même entité de détenir simultanément un club français et un club étranger, afin de préserver l’équité sportive et l’indépendance des compétitions, une interdiction jusqu’ici limitée aux seuls contrôles croisés entre clubs français.
Bien que présentée dans le contexte du football, la proposition de loi aurait vocation à s’appliquer à l’ensemble des disciplines sportives.
Les auteurs du texte soulignent que la pratique de la multipropriété porte atteinte à l’intégrité des compétitions en créant des situations de conflits d’intérêts potentiels, notamment lorsqu’un même groupe contrôle deux clubs susceptibles de s’affronter.
Cette initiative intervient dans un contexte d’internationalisation accélérée du capital footballistique et de montée en puissance des fonds d’investissement. En 2024, les fonds de private equity ont injecté près de 5 milliards d’euros dans le football européen, contre moins de 70 millions en 2018. Aujourd’hui, près de 40 % des clubs participant aux cinq grands championnats européens sont détenus par des investisseurs étrangers, dont plus de la moitié sont américains.
Ce phénomène s’accompagne d’une logique d’investissement à court terme pouvant cependant affecter la continuité sportive ou territoriale des projets, comme le démontre la faillite du fonds 777 Partners, propriétaire du Red Star de Saint-Ouen, laissant ainsi la gérance du club à ses créanciers.
Ce mouvement répond aussi à une logique désormais assumée : pour ces groupes, le club « principal » sert souvent de tête de file cherchant à multiplier les prises de participation afin de diversifier ses sources de revenus, mutualiser les risques et organiser des flux de joueurs à son bénéfice.
Face à cette vulnérabilité économique, la proposition de loi vise à inscrire dans le Code du sport une interdiction explicite du contrôle croisé de clubs français et étrangers, ainsi qu’un principe nouveau de préservation de l’aléa sportif. Ce principe consacre l’idée que l’incertitude du résultat, élément fondamental de la compétition, doit être protégée contre toute structuration capitalistique ou contractuelle susceptible d’en altérer la réalité.
Le texte prévoit également une extension des pouvoirs de contrôle des autorités sportives sur les participations financières et la gouvernance des clubs, ainsi que la possibilité pour ces dernières d’être saisie par des associations de supporters ou des collectivités locales.
En cas de non-respect de cette interdiction, la loi envisagerait une sanction significative : une amende pouvant atteindre 2 % du chiffre d’affaires mondial du propriétaire, marquant un durcissement notable par rapport au régime actuel.
Le texte a pour l’instant été renvoyé à la Commission des affaires culturelles et de l’éducation, et devrait prochainement faire l’objet d’une étude approfondie.
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