11/08/2020

Levée de l’anonymat par les plateformes en ligne en cas de téléversement illégal d’œuvres protégées

Dans l’arrêt Constantin Film Verleih (C-264/19), prononcé le 9 juillet 2020, la Cour de justice de l’Union Européenne a donné son interprétation de la directive 2004/48 qui prévoit que les autorités judiciaires peuvent ordonner la fourniture des informations et notamment les « adresses »  des producteurs, distributeurs et fournisseurs des marchandises ou des services contrefaisants portant atteinte à un droit de propriété intellectuelle.

L’arrêt en question oppose YouTube, la plateforme vidéo sur laquelle les films Parker et Scary Movie 5 ont été téléversés illégalement en 2013 et 2014, et Constantin Film Verleih, titulaire des droits d’exploitation exclusifs sur ces œuvres en Allemagne.

Constantin Film Verleih a exigé, de la part de YouTube et de Google, cette dernière étant la société mère de la première, qu’elles lui fournissent des informations relatives aux utilisateurs ayant procédé au téléversement illégal. Les deux sociétés ont refusé de fournir à Constantin Film Verleih les adresses courriel et numéros de téléphone ainsi que les adresses IP des utilisateurs ayant téléversé les films. La Cour de justice leur a donné raison, seule l’adresse postale devant être communiquée.

En effet, la Cour de justice a jugé que le terme « adresse », s’agissant de son sens habituel ne vise que l’adresse postale, c’est-à-dire le lieu de domicile ou de résidence d’une personne déterminée. Il s’ensuit que ce terme, lorsqu’il est utilisé sans autre précision, tel que dans la directive 2004/48, ne vise pas l’adresse courriel, le numéro de téléphone ou l’adresse IP.

 

De plus, les travaux préparatoires ayant conduit à l’adoption de la directive 2004/48 ne comportent aucun indice de nature à suggérer que le terme « adresse » inclue les adresses courriels et IP.

 

Enfin, l’examen d’autres actes de droit de l’Union visant l’adresse courriel ou l’adresse IP fait apparaître qu’aucun de ceux-ci n’utilise le terme « adresse », sans autre précision, pour désigner le numéro de téléphone, l’adresse IP ou l’adresse courriel.

 

Ainsi, la directive n’oblige pas les autorités judiciaires à ordonner à l’exploitant de la plateforme vidéo de fournir l’adresse courriel, l’adresse IP ou le numéro de téléphone de l’utilisateur ayant téléversé le film litigieux.

La Cour a néanmoins précisé que les États membres ont la faculté d’accorder aux titulaires de droits de propriété intellectuelle le droit de recevoir une information plus étendue, sous réserve, toutefois, que soit assuré un juste équilibre entre les différents droits fondamentaux en présence et du respect des autres principes généraux du droit de l’Union, tels que le principe de proportionnalité.

 

Pour plus d’informations :

Voir le communiqué de presse de la Cour de justice de l’Union Européenne et la décision C-264/19.