29/01/2018

L’impôt sur la fortune immobilière : quel impact pour les non-résidents ?

Présentation des dispositions principales

Depuis le 1er janvier 2018, l’impôt sur la fortune (ISF) a été remplacé par l’impôt sur la fortune immobilière (IFI). De prime abord, cette réforme ne semble pas impacter l’imposition des non-résidents, déjà exonérés d’ISF sur la majorité de leurs placements financiers. Néanmoins, l’IFI n’est pas sans conséquence sur le patrimoine des résidents étrangers.

Une nouvelle assiette. Le principal changement concerne l’assiette de l’impôt, désormais constituée par la valeur nette au 1er janvier des biens et droits immobiliers situés en France, possédés directement ou indirectement par le redevable. La détention indirecte peut impliquer plusieurs sociétés, qu’elles soient françaises ou étrangères, pourvu que les actifs immobiliers détenus dans cette chaîne de participation soient situés en France. Dans ce cas, c’est la valeur des parts représentative des biens immobiliers qui sera prise en compte.

La difficile évaluation des titres. Les différents niveaux d’interposition de sociétés peuvent rendre difficile l’évaluation de la valeur des titres imposables. Le résident étranger devra dès lors se montrer méthodique dans l’évaluation de ses parts en s’informant sur la nature des actifs (immobiliers français ou autres) détenus par les sociétés concernées. Si le contribuable n’a pas accès aux informations lui permettant de connaître la fraction de la valeur de ses titres imposable, une tolérance est prévue, qui permet une exonération sous réserve le contribuable détienne directement ou indirectement moins de 10 % du capital de la société propriétaire. Prudence toutefois dans le maniement de cette clause de bonne foi qui pourrait être remise en cause par l’administration en cas d’abus.

Les biens exonérés. Parmi les biens exonérés se trouvent l’immobilier affecté à l’activité professionnelle du redevable ainsi que l’immobilier non professionnel inclus dans les participations de moins de 10% dans des sociétés opérationnelles. L’exclusion touche également les parts des sociétés foncières cotées représentant moins de 5% de leur capital. Il est donc intéressant pour un redevable qui souhaite investir dans des sociétés possédant un patrimoine immobilier de détenir une faible participation et de diversifier son investissement.

Les conventions fiscales internationales. Les non-résidents couverts par une convention stipulant une clause relative à l’ISF ne devraient être imposés en France que sur leurs immeubles détenus en direct et sur une fraction de la valeur des parts qu’ils détiennent dans des sociétés à prépondérance immobilière.

En revanche, les investisseurs non-résidents qui ne peuvent pas se prévaloir du bénéfice d’une convention (cas des résidents d’Etat non conventionnés ou d’Etat dont la convention ne couvrant pas l’impôt sur la fortune tels que la Belgique, le Portugal ou le Royaume uni, par exemple,) pourraient dans certains cas être plus lourdement taxés à l’IFI qu’ils ne l’étaient à l’ISF (cf. commentaires infra sur les non-résidents « perdants »).

Conséquences pour les non-résidents

Les non-résidents gagnants 

  • Les non-résidents qui ne bénéficiaient pas d’exonération d’ISF à raison de leurs biens français non-immobiliers (i.e., biens qui ne constituaient ni des actifs immobiliers, ni des titres de société à prépondérance immobilière, ni des titres de sociétés qui conféraient au contribuable avec son groupe familial plus de 50% du contrôle indirect d’un actif immobilier français)

Echappent au nouvel impôt sur la fortune immobilière les non-résidents qui ne détiennent pas, directement ou indirectement, des biens ou droits immobiliers en France.

Ainsi, les contribuables qui étaient auparavant assujettis à l’ISF sur des biens meubles français non exonérés (notamment les biens meubles corporels et les titres ne pouvant pas être exonérés au titre des placements financiers – titres de participation dans des sociétés françaises), devraient pouvoir être exonérés d’IFI, sauf, en ce qui concerne les titres, si ceux-ci sont relatifs à des sociétés détenant directement ou indirectement des actifs immobiliers français non exonérés.

Les non-résidents perdants 

  • Les non-résidents détenant une participation de moins de 10% dans une société non-opérationnelle

Les non-résidents qui détenaient des titres de sociétés directement ou indirectement propriétaires d’actifs immobiliers français pouvaient être exonérés d’ISF si ces titres ne constituaient pas des titres de participation (i.e., représentaient moins de 10% du capital social de la société concernée). Cette exonération ne s’appliquait pas, en revanche, aux titres de sociétés à prépondérance immobilière ou en cas de contrôle détenu, avec le groupe familial, sur la société propriétaire de l’actif immobilier sous-jacent (si celle-ci n’affectait pas l’actif immobilier à son activité).

Désormais, les non-résidents placés dans la même situation seront imposés, sauf s’il s’agit d’une détention inférieure à 10% soit dans une société opérationnelle, soit dans une société non-opérationnelle si les redevables établissent qu’ils ne sont pas en mesure de disposer des informations nécessaires à l’évaluation de la part taxable de leurs titres.

  • Les non-résidents détenant une participation de plus de 10% dans une société étrangère directement ou indirectement propriétaire d’actifs immobiliers français

Les participations détenues par les non-résidents dans des sociétés non françaises étaient auparavant exonérées, sauf si les sociétés en question étaient à prépondérance immobilière ou en cas de contrôle direct ou indirect, par le contribuable avec son groupe familial, par l’intermédiaire de la société étrangère, dans la société propriétaire de l’actif immobilier français sous-jacent.

Désormais, les non-résidents actionnaires à plus de 10% d’une société étrangère directement ou indirectement propriétaire d’un actif immobilier français, seront systématiquement imposés sur une fraction de la valeur des titres de la société étrangère, sauf si les actifs immobiliers français sous-jacents sont affectés à l’activité opérationnelle de la société qui les détient.

  • Les non-résidents ayant personnellement contracté des dettes désormais non-déductibles ou dont leur sociétés interposées ont contracté de telles dettes

S’agissant des dettes contractées directement par le redevable, toutes les dettes relatives aux actifs imposables en France pouvaient, auparavant, être déduites. Désormais, les dettes déductibles sont plus strictement définies. Il s’agit des dettes souscrites pour les dépenses d’acquisition, de réparation, d’entretien, d’amélioration, de construction, ou d’agrandissement de biens ou droits immobiliers imposables et les impositions dues à raison des propriétés immobilières.

En outre, la loi exclut désormais la déduction des prêts contractés directement ou par société interposée en vue de l’acquisition de biens immobiliers lorsque les prêts sont souscrits auprès du redevable lui-même ou auprès d’un membre de son foyer fiscal.

Par ailleurs, certaines dettes contractées par une société interposée auprès du redevable ou de son foyer fiscal ou de sociétés qu’ils contrôlent sont présumées abusives ; ces passifs ne sont déductibles que si, selon les cas, le redevable justifie qu’ils n’ont pas un objectif principalement fiscal, ou qu’ils sont souscrits à des conditions normales.

Enfin, les prêts contractés (directement par le redevable ou par une société interposée) auprès des membres de la famille (hors foyer fiscal) ou auprès d’une société contrôlée par le redevable sont déductibles à condition de stipuler des conditions normales.

  • Les non-résidents détenant plus de 5 % de participation dans une SIIC

Les non-résidents actionnaires de SIIC étaient généralement exonérés d’ISF, leur participation étant considérée comme un placement financier exonéré. Désormais, seuls les porteurs détenant, individuellement ou avec leur foyer fiscal, moins de 5% du capital et des droits de vote d’une SIIC échappent à l’IFI.

Les non-résidents dont la situation ne change pas

La situation des non-résidents qui détiennent directement des immeubles en France, ou indirectement par l’intermédiaire d’une chaîne de participations « contrôlante » qui ne fait apparaître aucun autre actif non-immobilier, ne devraient pas changer avec le nouvel IFI, sous réserve de l’exclusion de certaines dettes (cf. commentaires supra) et de l’application des conventions fiscales internationales.