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02/04/2025

Quand l'art se frotte aux géants du luxe : histoire d'un équilibre impossible

Dans une décision du 2 avril 2025, le Tribunal Judiciaire de Paris rappelle que, si la liberté de création artistique constitue un principe fondamental, elle ne saurait justifier l’usage d’une marque protégée à des fins promotionnelles ou commerciales.

Quand l'art se frotte aux géants du luxe : histoire d'un équilibre impossible

En 2018, un artiste a créé une collection d'œuvres en trois dimensions intitulée “3D Watches” représentant des villes intégrées dans des cadrans de montres de la marque "Rolex".

1. Une tolérance encadrée par la liberté d’expression

Utiliser Rolex dans ses créations ? Oui, mais pas n'importe comment. L’usage d’une marque par un tiers à des fins artistiques peut, en principe, être considéré comme légitime, dès lors qu’il s’inscrit dans le respect des usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale. Ce type d’usage doit également être interprété à la lumière des droits fondamentaux, et notamment de la liberté d’expression, dont le respect impose une application proportionnée des dispositions du droit des marques.

2. Une instrumentalisation promotionnelle excédant le cadre loyal

Or, en l’espèce, si l’intégration du signe “Rolex” dans les titres des œuvres du créateur relève de son expression artistique, son utilisation répétée dans des supports promotionnels — notamment sur les réseaux sociaux ou dans un clip vidéo diffusé sur YouTube — franchit les limites de l’usage loyal. Les éléments examinés révèlent une exploitation commerciale manifeste de la marque, renforcée par l’association du terme “Watch” ou par la présence visible du logo à la couronne. Ces pratiques s’inscrivent dans une logique d’auto-promotion, tirant parti de la notoriété de la marque pour accroître la visibilité des œuvres. Dès lors, le public pertinent, constitué d’amateurs de montres de luxe, est susceptible de percevoir à tort l’existence d’un lien économique entre l’artiste et la société Rolex. Une telle confusion porte atteinte à la renommée de la marque et contrevient aux exigences de loyauté prévues par le droit des marques.

Tribunal judiciaire de Paris, 2 avril 2025, RG n° 23/04114


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